La Commission européenne combat les cartels, nous dit-on. Est-ce là une saine attitude, consistant à défendre le consommateur contre les ententes illicites entre industriels ? Ou assiste-t-on plutôt à des mesures dogmatiques consistant à vouloir « tordre » la réalité pour la faire coller à des théories fumeuses ? Un bref aperçu du sens de ces mots, et un rappel de ce qu’est la concurrence permettent de répondre à cette question.
Cartels et oligopoles
La Commission européenne a encore frappé, avec « une amende de 1,38 milliard d’euros pour quatre fournisseurs de verre à l’industrie automobile, dont Saint-Gobain qui paye très cher ses récidives ». Il s’agit soi-disant d’un combat contre les cartels.
Qu’est-ce qu’un cartel ? En économie, un cartel est un oligopole :
Une situation d’oligopole se rencontre lorsque sur un marché il y a un nombre très faible d’offreurs (vendeurs) et un nombre important de demandeurs (clients). On parle aussi de situation de marché oligopolistique. Il s’agit du type de marché le plus répandu.
Concurrence pure et parfaite
[1] Un marché de concurrence pure et parfaite est un marché qui satisfait 5 conditions : atomicité des agents, homogénéité des produits, transparence, libre entrée et libre sortie, libre circulation des facteurs de production.Personnellement, je ne vois pas très bien en quoi il est gênant que des acteurs se mettent d’accord, ensemble et sans nuire à personne. En fait, le problème de ces oligopoles n’est pas lié au fait qu’ils nuiraient aux consommateurs (la seule chose qui peut nuire au consommateur est l’interdiction d’entrer sur le marché pour les nouveaux acteurs), mais bien plutôt qu’il ne rentre pas dans le cadre de la concurrence pure et parfaite[1]. Cette conception idiote et dogmatique de la concurrence, en contradiction avec la réalité factuelle, mène à ce genre de combats idiots contre des monopoles pourtant obtenus sans contraintes (donc légitimes)[2] ou contre des cartels qui ne sont que le reflet de la réalité.
C’est ce qu’expliquait déjà Hayek : [2] comme Microsoft, par exemple que la commission a également puni sans raison valable
À ses yeux, cette notion qui ne correspond en rien au sens habituel de la notion de « concurrence » est qualifiée de « totalement non-pertinente ». Les conclusions politiques que l’on pourrait tirer d’un tel modèle sont « fort trompeuses et même dangereuses ». […]
Des diverses caractéristiques que les économistes néoclassiques associaient traditionnellement à la notion de concurrence, Hayek n’en retient qu’une seule, soit celle voulant qu’un marché concurrentiel ne tolère aucune barrière à l’entrée de participants potentiels. On notera que cette caractéristique négative est une exigence du « laissez faire » et non pas d’une représentation idéalisée de la concurrence. Hayek ne se fait pas faute de ridiculiser les autres caractéristiques traditionnelles comme celles qui requièrent, pour que le marché soit vraiment concurrentiel, la stricte homogénéité des marchandises transigées et la présence d’une multitude de vendeurs ou d’acheteurs incapables d’exercer chacun pour leur part une influence significative. Comme on pouvait toutefois s’y attendre, c’est la notion d’information complète qui lui paraît la plus incongrue des caractéristiques traditionnelles de la concurrence, au point où il y voit une sorte de condensé des errements des économistes néoclassiques.Maurice Lagueux, in « Qu’est-ce que le néolibéralisme ? »
La commission serait donc bien inspirée de centrer ses « combats » économiques sur la lutte contre les monopoles illégitimes, à savoir ceux obtenus par la contrainte. Les monopoles d’Etat nuisent aux consommateurs bien plus que les cartels sur des marchés concurrentiels. C’est l’interdiction d’entrer sur un marché – aux acheteurs ou aux vendeurs – qui constitue le problème. Battons-nous contre ce qui nuit à l’échange libre, plutôt que de suivre des idéologues voulant à tout prix faire coller la réalité à des modèles douteux et inapplicables.
Laisser un commentaire