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  • Vous avez dit conservateur ?

    Vous avez dit conservateur ?

    Je trouve enfin le temps de faire la recension de l’excellent livre de Laetitia Strauch-Bonart, « Vous avez dit conservateur ?« . J’avais eu la grande chance de l’Ă©couter prĂ©senter son livre lors d’un apĂ©ro de l’Avant-Garde. Je l’avais trouvĂ©e passionnante, sincĂšre. Et comme elle avait citĂ© dans son discours mon livre politique prĂ©fĂ©rĂ© (« Droit, LĂ©gislation et liberté »), je ne pouvais qu’ĂȘtre conquis.

    3 idées clés du livre

    Si l’on devait se risquer à  rĂ©sumer ce livre en quelques phrases, il faudrait insister sur trois idĂ©es clĂ©s :

    • la pensĂ©e conservatrice a ses auteurs, et est d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale une pensĂ©e de la transmission, de la stabilitĂ© dans l’Ă©volution
    • les conservateurs ne sont pas opposĂ©s au changement ; ils veulent simplement inverser la charge de la preuve. A ceux qui veulent modifier la sociĂ©tĂ© d’expliquer, quand c’est nĂ©cessaire, pourquoi il faudrait le faire, plutĂŽt que de laisser en place les structures que la tradition humaine a fait Ă©merger ? Le conservatisme, ce n’est pas un rejet du progrĂšs, c’est un refus du progrĂšs pour le progrĂšs, et une maniĂšre de questionner les « constructivistes ». Conservatisme et progressisme sont donc, à  mes yeux, les deux faces indispensables d’une mĂȘme chose qui est la pensĂ©e du changement. Qu’est-ce qui reste constant dans le changement, et qu’est-ce qui change ?
    • le conservatisme est un contrepoint indispensable pour penser le libĂ©ralisme ; c’est pourquoi à  l’Ă©poque oĂč j’oeuvrais sur des blogs politiques, j’avais à  coeur avec d’autres, de faire Ă©merger un courant libĂ©ral-conservateur. Le conservatisme, adossĂ© à  une culture, à  une identitĂ©, permet d’ancrer la pensĂ©e libĂ©rale, souvent abstraite et gĂ©nĂ©rale.

    Vous avez dit conservateur ?

    Je vous recommande ce livre trĂšs facile à  lire, trĂšs direct, et qui pose beaucoup de bonnes questions. Laetitia Strauch-Bonart a eu l’intelligence de convoquer des auteurs et intellectuels français pour Ă©changer et construire sa rĂ©flexion (le conservatisme est plutĂŽt naturellement prĂ©sent dans les pays anglo-saxons). Nous avons donc le plaisir de dĂ©couvrir ou de redĂ©couvrir des personnes comme RĂ©mi Brague, Alain-GĂ©rard Slama, Philippe BĂ©nĂ©ton, Chantal Delsol, Jean-Pierre Le Goff, Jean Clair, Alain Bensançon, Marcel Gauchet, Alain Finkielkraut, Paul Thibaud, Philippe Reynaud (j’en oublie certainement). Tous ne se disent pas conservateurs, mais pour ceux-là  le mot « conservateur », et les idĂ©es conservatrices, mĂ©ritent un dĂ©tour et apportent à  notre rĂ©flexion.
    Pour terminer, une remarque qui devrait vous conduire à  dĂ©couvrir ce livre : il est surprenant que le mot de « conservatisme » soit devenu en France une forme d’insulte. Le conservateur se rĂ©duit dans notre esprit le plus souvent, à  sa caricature la plus grotesque : une sorte de rĂ©actionnaire qui s’oppose farouchement au ProgrĂšs (presque dĂ©ifiĂ© et confondu avec la nouveautĂ©) pour des raisons de pouvoir, ou de crispation. Qu’une pensĂ©e aussi riche, et actuelle, soit caricaturĂ©e à  ce point en dit long sur l’ambiance intellectuelle qui caractĂ©rise notre dĂ©but de siĂšcle. Elevons le dĂ©bat, lisons Strauch-Bonart !

  • A l’Ă©preuve du rĂ©el

    A l’Ă©preuve du rĂ©el

    Points communs entre Sansal et Rioufol ?

    Quels sont les points communs entre Ivan Rioufol et Boualem Sansal ? Il y en a plusieurs :

    • l’un et l’autre viennent de publier un livre, « La guerre civile qui vient » pour le premier, et « 2084 » pour le second
    • ces deux livres sont excellents, bien Ă©crits, et portent des valeurs humanistes et dĂ©mocrates
    • l’un comme l’autre parlent du mĂȘme sujet : l’islam, mais en l’abordant par deux aspects trĂšs diffĂ©rents. Rioufol propose un essai politique, qui va droit au but, et qui montre – à  mon sens avec des trĂšs bons arguments – pourquoi les tergiversations d’un Pierre Manent sont dangereuses. Notre sociĂ©tĂ© doit rĂ©sister à  des formes d’organisations qui remettent en question ses valeurs de tolĂ©rance, de libertĂ© et d’Ă©galitĂ© des personnes. Sansal, romancier, propose un rĂ©cit qui permet de toucher du doigt la maniĂšre dont la vĂ©ritĂ© disparait dans un univers totalitaire, et avec elle une partie de ce qui fonde les rapports humains tels que nous les connaissons. Comme dans « 1984 », auquel il fait de nombreux clins d’oeils, nous dĂ©couvrons un pouvoir totalitaire qui pour se maintenir est prĂȘt à  tout ; violences, bien sĂ»r, mais aussi conditionnement, exactions, distorsions du rĂ©el, inĂ©galitĂ© totale des citoyens.

    Ce réel que les idéologies déforment

    Ce rĂ©el que l’un comme l’autre dĂ©crivent, l’un dans un futur lointain, et l’autre dans le prĂ©sent, c’est la maniĂšre subtile avec laquelle les idĂ©ologies – l’islam en est une – peuvent se jouer de la rĂ©alitĂ©, des faits, et influencent peu à  peu les discours, et finalement la pensĂ©e.
    Il me semble que ces deux livres, que je relie artificiellement dans ce billet, mĂ©ritent d’ĂȘtre lus. De maniĂšre urgente, et insoumise. Si vous les avez lus, ou si vous comptez le faire, ou si vous ne comptez pas le faire, laissez donc un commentaire ! C’est trĂšs exactement ce que les totalitaires et les idĂ©ologues ne supportent pas : l’Ă©change, la discussion, la controverse, le dĂ©bat d’idĂ©es critique et pluraliste.

  • Situation de la France

    Situation de la France

    GrĂące au commentaire d’un de mes lecteurs (Quentin, pour ne pas le nommer), j’ai dĂ©couvert et dĂ©vorĂ© l’excellent bouquin de Pierre Manent, « Situation de la France« . L’auteur y revient sur les problĂšmes d’identitĂ© qui peuvent se poser aux français, en 2016. Des problĂšmes qui tournent bien sĂ»r, comme toujours lorsque l’on parle d’identitĂ© et de culture (ou de civilisation), autour de la question religieuse, et du fait religieux.

    Situation de la France

    C’est un livre fort, dense, que nous livre Pierre Manent, et qui prĂ©sente beaucoup de points vraiment positifs et stimulants.

    • en quelques cent pages, il dresse un constat sans appel d’un certain nombre de problĂšme posĂ©s par l’islam dans une sociĂ©tĂ© chrĂ©tienne, en termes de chocs de valeurs. Pas de chichis, pas de politiquement correct pour se protĂ©ger de – fort prĂ©visibles – attaques de la bien-pensance. C’est clair, Ă   la fois respectueux des personnes, et sans concession pour les idĂ©es.
    • Pierre Manent amĂšne des idĂ©es fortes, et des questions clĂ©s Ă   cette question Ă©pineuse. Il constate par exemple que la laĂŻcitĂ©, sous la forme qu’on lui connait, c’est-Ă  -dire sous une forme ayant consistĂ© Ă   vider l’espace public du « fait religieux », n’est pas efficace pour « rĂ©former » l’islam. Force est de lui donner raison, mĂȘme si pour ma part, je mettrais un bĂ©mol. Il me semble qu’une conception stricte de la laĂŻcitĂ©, libĂ©rale, vise simplement Ă   sĂ©parer le politique du religieux, et non pas Ă   cacher, ou Ă   empĂȘcher l’expression religieuse dans l’espace public. Notre sociĂ©tĂ©, en partie d’ailleurs, sous les provocations de radicaux, a eu tendance rĂ©cemment Ă   vouloir lutter contre cette radicalisation par une sorte d’oubli des signes religieux (ce qui se dĂ©fend), mais aussi Ă   une forme d’effacement du religieux.
    • Cet effacement du fait religieux a conduit Ă   nier longtemps le problĂšme posĂ© par l’islam. Ce n’est pas que nous ne voulions pas, collectivement, voir les problĂšmes posĂ©es par l’idĂ©ologie islamique, c’est simplement que nous ne voyions pas cela comme une religion, c’est-Ă  -dire Ă   la fois comme Ă©lĂ©ment identitaire fort, et comme corpus idĂ©ologique structurĂ©
    • Il propose des Ă©lĂ©ments intĂ©ressants Ă©galement sur nos racines et notre culture : assumons donc d’ĂȘtre une culture chrĂ©tienne, qui accueille un certain nombre de cultures diffĂ©rentes, mais qui pour autant n’en demeure pas moins chrĂ©tienne. assumons que notre histoire, et nos valeurs peuvent nous permettre d’assumer que la Nation joue un rĂŽle intĂ©grateur, en tant qu’idĂ©al, Ă   la fois structurant et inclusif.
    • Les pistes proposĂ©es par Pierre Manent sont vigoureuses, et « simples » : l’Etat et la Nation doivent « forcer » (« commander » est le terme qu’il utilise) les responsables musulmans Ă   couper les ponts avec toutes les sources de financement extĂ©rieures. Par ailleurs, la communautĂ© musulmane et le reste du pays doivent faire une sorte de « pacte », une sorte de geste de bonne volontĂ©, de main tendue de part et d’autre. Pour cela, un certain nombre de concessions doivent ĂȘtre faites, de part et d’autres, et un certain nombre d’Ă©lĂ©ments fondamentaux, non nĂ©gociables, doivent ĂȘtre rappelĂ©s. LibertĂ© de conscience, bien sĂ»r. Et d’autres Ă©lĂ©ments fondateurs d’une sociĂ©tĂ© ouverte et libre. Cela me rappelle un de mes billets, parlant d’un SanhĂ©drin de l’Islam.

    Je ne saurais assez vous recommander la lecture de ce livre indispensable pour alimenter la rĂ©flexion politique, la vraie. Pas celle des courses de lĂ©vriers Ă©lectorales, mais celle qui touche Ă   l’identitĂ©, Ă   ce que nous voulons construire, ensemble, comme sociĂ©tĂ©.

    Concessions, ou Egalité ?

    Deux points me posent problĂšme dans le livre de Manent, et mĂ©riteraient d’ĂȘtre approfondis par des Ă©changes (en commentaire?). D’une part, Pierre Manent semble prĂȘt Ă   des concessions sur la place de la femme chez les musulmans, et cela me parait, Ă   moi, inacceptable. Et incompatible avec l’idĂ©e que je peux me faire d’un pays dont la devise comporte le mot ambitieux et exigeant d’ »Égalité ». Et d’autre part, aprĂšs avoir constatĂ© que la laĂŻcitĂ© ne permet pas d’aider l’islam Ă   se rĂ©former, Pierre Manent semble considĂ©rer que la Nation peut le faire. Cela soulĂšve bien des questions, car il me semble que notre Nation, et notre culture française, comporte justement dans ses gĂšnes une forme de laĂŻcitĂ© (qui peut ĂȘtre un outil). De plus, aprĂšs dĂ©crit l’Etat et ses institutions comme passablement affaiblis, ils semblent finalement capable de rĂ©aliser un tour de force exceptionnel, que seuls une volontĂ© forte et une capacitĂ© d’action durable peuvent rendre possible.
    Un dernier point aveugle dans l’ouvrage (mais ce n’est pas une critique, c’est un appel) : si une telle Ă©volution – souhaitable – Ă©tait possible, elle ne pourrait se faire qu’en ayant au prĂ©alable ou en parallĂšle rĂ©duit fortement les flux migratoires entrants dans notre pays. Comment intĂ©grer bien si l’on est trop ouvert ? Qu’en pensez-vous ? L’islam peut-il, en France, se rĂ©former ? Nos institutions sont-elles suffisantes ? Quelles modalitĂ©s de mise en France ? N’hĂ©sitez pas Ă   partager vos commentaires, idĂ©es et suggestions en commentaire !

  • Etes-vous indispensable ?

    Etes-vous indispensable ?

    Je voulais vous raconter l’histoire de ma reconversion dans ma boite. Et voilĂ   que Dominique me met dans les mains « Linchpin« , de Seth Godin. C’est un superbe livre, passionnant, riche, foisonnant, dĂ©rangeant parfois. Au final, il a changĂ© ma maniĂšre de penser mon travail, mĂȘme si cela n’a fait que me permettre de mettre des mots sur ce que je ressentais. Je repousse donc un peu le premier billet de la sĂ©rie, et vous conseille ce livre admirable. De quoi parle ce livre ? De la maniĂšre dont on peut se rendre indispensable au travail, s’Ă©panouir, enrichir les autres, crĂ©er des connexions. C’est ce que Seth appelle faire son travail comme un art. L’art, c’est ce qui touche les autres et les fait changer. En donnant aux autres, en Ă©crivant le plan plutĂŽt qu’en suivant celui donnĂ© par les chefs. Un Linchpin, c’est un pivot, c’est celui qui créé du lien. C’est celui qui change les autres par son art (sa maniĂšre pleine de faire son travail). C’est chacun de nous : voilĂ   le propos de Seth Godin. Chacun peut devenir un « linchpin », et il suffit pour cela de vaincre la rĂ©sistance, le cerveau reptilien (le « lĂ©zard »), qui veut tout sauf se retrouver dans l’inconfort, dans le risque, dans l’inattendu. Je ne saurais trop conseiller ce livre Ă   tous ceux qui veulent marier travail et passion. Cela ne dĂ©pend pas du travail, mais de nous. Il y a des « linchpin » parmi les garçons de cafĂ©, parmi les ingĂ©nieurs, parmi les artistes, parmi les dirigeants. Partout. Pourquoi pas vous ?

  • VĂ©ritĂ© partagĂ©e, ou solidaritĂ© volontaire ?

    En tenant un blog politique, on apprend à  dĂ©couvrir une vĂ©ritĂ© simple : la discussion requiert des points de vue variĂ©s pour vivre et exister, tandis que l’action nĂ©cessite de plutĂŽt se retrouver avec des gens qui pensent la mĂȘme chose. Les deux situations extrĂȘmes à  Ă©viter sont bien sĂ»r, pour la discussion, de laisser la porte ouverte à  tous les points de vue, ce qui conduit à  un pugilat trĂšs peu constructif, et pour l’action, de ne se regrouper qu’avec les gens qui pensent exactement la mĂȘme chose, ce qui conduit au dogmatisme. Le rapport à  la vĂ©ritĂ© diffĂšre, d’ailleurs, dans ces deux situations. Dans la discussion, la vĂ©ritĂ© se construit à  plusieurs, ou au moins nĂ©cessite de confronter son point de vue à  celui des autres pour le faire naĂźtre, pour lui donner forme. MĂȘme en cas de dĂ©saccord, la discussion permet de construire des raisonnements, de peaufiner des arguments, de faire ses armes rhĂ©toriques. La vĂ©ritĂ© se partage, s’explicite. Dans l’action, la vĂ©ritĂ© est acquise – en partie au moins – et devient plus forte avec le nombre. La logique n’est pas de construire, mais de gagner en puissance, d’influencer. Les opposants et les contradicteurs se transforment en ennemis, mĂȘme figurĂ©s. Mais, et c’est important, les partenaires dans l’action deviennent des amis, au sens oĂč l’on fait ensemble. Finalement, je prĂ©fĂšre – dans mon rapport à  la vĂ©ritĂ© – celui que permet la discussion et l’Ă©change, et le dĂ©saccord. La vĂ©ritĂ© personnelle, mais partagĂ©e, et sans cesse confrontĂ©e à  l’avis des autres. Et je prĂ©fĂšre – dans mon rapport aux autres – celui que permet l’action commune. L’intĂ©rĂȘt commun bien compris, la solidaritĂ© volontaire. J’ai bien de la chance de pouvoir faire les deux – Ă©changer, agir – avec les mĂȘmes personnes.

  • Faut-il autoriser la construction de nouvelles mosquĂ©es ?

    Une association musulmane est entrĂ©e de force dans la mairie de Torcy, pour « nĂ©gocier » avec le maire de la commune l’obtention d’un terrain pour construire une mosquĂ©e. Visiblement, il s’agit d’un peu plus qu’une mosquĂ©e, mais bon.
    C’est l’Ă©ternel dĂ©bat : au nom de la libertĂ©, doit-on permettre à  tous de pratiquer leur culte, ou doit-on diffĂ©rencier les religions entre elles et reconnaitre un caractĂšre « sectaire » à  l’Islam ?
    Je n’ai pas de rĂ©ponse dĂ©finitive à  cette question. Mais, comme je l’avais dĂ©jà  exprimĂ© ici, on ne peut pas comprendre la rĂ©alitĂ©, les rapports de forces à  l’oeuvre, si on ne connait pas cette rĂ©alitĂ©. Si on s’accroche à  des principes (justes et bons, je suis le premier à  en convenir), sans vouloir diffĂ©rencier ceux qui aspirent à  vivre dans une sociĂ©tĂ© ouverte et libre, et ceux qui veulent imposer des rĂšgles de vie incompatibles avec ces mĂȘmes principes, on risque bien de scier la branche sur laquelle on est assis.
    Alors, pour ceux qui veulent savoir ce qu’est l’Islam, voilà  une liste fort utile (sinon, vous pouvez continuer à  lire ce blog):
    Se renseigner sur l’Islam :

    Et pour tous, un petit test vous permettant de donner votre avis :
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