Dès le début, j’ai été captivé par le livre de Luc Ferry, « Apprendre à vivre« . Il s’agit de philosophie, un peu vulgarisée, mais au niveau d’implication où je l’attends : de la philosophie non pas théorique et abstraite, mais de la philosophie à vivre, qui est une réflexion sur la vie, et qui a pour ambition de permettre de « vivre mieux ».
Une idée forte m’a séduite au tout début du livre, à propos de la mort. J’ai toujours trouvé difficile de comprendre pourquoi l’idée de la mort est si présente dans nos vies, bien qu’on ne meure qu’une fois, et que le moment même de la mort n’est pas là . Luc Ferry explique que la mort n’est pas présente qu’à un moment, mais dans plein de petites instants de nos vies, tous ceux qui ne seront jamais plus là . Le temps qui passe. « Never more », c’est le titre d’un poème d’Edgar Allan Poe (Le corbeau) que Luc Ferry cite pour illustrer son propos.
Toutes ces joies vécues, une fois passées, renvoient à l’idée de la mort. « Jamais plus ». Cette nostalgie est très forte chez moi. Quand je repense aux moments passés en famille, à déguster du vin de Bordeaux, cet été, l’idée m’envahit que ces moments ne sont plus là , et ne seront plus jamais là . Je pourrais fondre en larmes en me plongeant dans cette nostalgie. Nostalgie, joie empoisonnée. Joie aussi, oui, car ces souvenirs sont des souvenirs de bonheur.
Luc Ferry explique ensuite que si les religions sont une démarche vers le salut par un autre (Dieu, quelle qu’en soit la forme et la nature), tandis que la philosophie est une démarche vers le salut par nous-mêmes. Je suis frappé par une chose : parler de salut, comme le fait Ferry, et comme le fait également Comte-Sponville, est pour moi une chose étrange. Tant il me parait évident que Camus, sur ce point, avait raison : il n’y a pas de salut. Peut-être Ferry revient-il là -dessus plus loin dans le livre. C’est possible. Et peut-être qu’aussi, le sens que je donne au mot « salut » n’est pas le même que lui. On peut entendre par « salut » le fait de parvenir à ne vivre que dans le présent, et en harmonie avec l’univers.
Si l’on entend par éternité non la durée infinie mais l’intemporalité, alors il a la vie éternelle celui qui vit dans le présent.
La sagesse consiste, à mon sens, à accepter qu’il n’y a pas de salut possible. Acceptation impossible, pour tout être désirant plus que tout vivre et survivre. C’est l’absurde de nos vies, le tragique. Et c’est ce qui en fait toute la valeur. Et toute la saveur, aussi.
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