Don’t Stop Google

A l’heure où les eurodéputés se livrent à  de ridicules exercices de postures marxistes et populistes, il serait utile de rappeler quelques éléments de science économique. C’est probablement le manque le plus cruel de notre système éducatif : les élèves sortent de l’école — pour la plupart – sans avoir acquis les fondements de la science économique.

Rappel sur les marchés

Avec internet, c’est peu de le dire, la connaissance est disponible, très largement. Ainsi je proposerais bien aux eurodéputés, mais aussi à  tous ceux qui veulent lire un livre fantastique, d’aller sur le site de l’Institut Coppet pour découvrir « L’action humaine », de Ludwig Von Mises. Economiste, Ludwig Von Mises a écrit cet ouvrage majeur en 1949. Il était, entre autres, le professeur et père spirituel de Friedrich Hayek, autre grand philosophe et économiste (prix Nobel d’économie 1974).
Je ne résiste pas au plaisir de copier ici deux petits extraits (allez lire ce livre, c’est magnifique de simplicité et de clarté).
Marché :
Le marché n’est pas un lieu, une chose, ni une entité collective. Le marché est un processus, réalisé par le jeu combiné des actions des divers individus coopérant en division du travail. Les forces qui déterminent l’état — continuellement modifié — du marché sont les jugements de valeur de ces individus et leurs actions telles que les dirigent ces jugements de valeur. L’état du marché à  tout moment est la structure des prix, c’est-à -dire la totalité des taux d’échange telle que l’établit l’interaction de ceux qui veulent acheter et de ceux qui veulent vendre. Il n’y a rien qui ne soit de l’homme, rien de mystique en ce qui concerne le marché. Le déroulement du marché est entièrement produit par des actions humaines. Tout phénomène de marché peut être rattaché originairement à  des choix précis de membres de la société de marché.
Ils ne sont pas rares ceux qui parlent des marchés comme s’il s’agissait d’une entité collective, pire d’un individu. « les marché ont eu peur de… », « les marchés ont jugés que… ». Ecoutez BFM radio, qui est pourtant une radio économique avec plein de supers intervenants, et vous verrez que même chez les économistes, cette manière de pensée est courante.

Rappel sur la concurrence

Concurrence
Aujourd’hui des gens affirment la même chose en ce qui concerne diverses branches de la grande entreprise : vous ne pouvez ébranler leur position, elles sont trop grandes et trop puissantes. Mais la concurrence ne signifie pas que n’importe qui puisse prospérer en copiant simplement ce que d’autres font. Cela signifie le droit reconnu à  tous de servir les consommateurs d’une façon meilleure ou moins chère sans être entravé par des privilèges accordés à  ceux dont les situations acquises seraient atteintes par l’innovation. Ce dont un nouveau venant a le plus besoin s’il veut porter un défi aux situations acquises des firmes établies de longue date, c’est surtout de la matière grise et des idées. Si son projet est apte à  satisfaire les plus urgents d’entre les besoins non encore satisfaits des consommateurs, ou à  y pourvoir à  un moindre prix que les vieux fournisseurs, il réussira en dépit de tout ce qu’on répète abondamment sur la grandeur et le pouvoir de ces firmes.
La concurrence libre et parfaite n’existe pas, c’est un mythe inventé par des gens qui ne comprennent pas l’économie, ni la logique de marché. La concurrence c’est simplement le droit de toute personne ou entreprise à  entrer sur le marché, comme le rappelait à  juste titre Nicolas Bouzou et Philippe Silberzahn sur Twitter.

Logique d’esclaves

Jusqu’à  preuve du contraire, aucun Etat n’empêche aux concurrents de Google de venir le concurrencer. Google est de toute évidence sur un marché concurrentiel.
Comme décidemment on trouve presque tout sur internet, notamment en termes de livres, j’inviterais bien également les eurodéputés à  lire ce texte 260 du chapitre 9 de l’ouvrage de Nietzsche, « Par-delà  le bien et le mal », mais ça risque d’être un peu plus compliqué. Ils comprendraient probablement qu’au-delà  d’affirmer leur idéologie constructiviste et socialiste, leurs prises de positions ne traduisent finalement que leur sentiment d’impuissance et de soumission face à  Google et aux US, puisqu’ils en sont à  bêtement considérer que ce qui est puissant est nécessairement mauvais, donc une cible pour des combats politiques. Les eurodéputés n’ont-ils aucun autre combat plus urgent que d’essayer d’empêcher d’agir une société utile, dynamique, qui créé de l’emploi et de l’innovation ?
Je reposte en conclusion le tweet de Loïc Lemeur :


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Commentaires

6 réponses à “Don’t Stop Google”

  1. Avatar de Jean-Marc
    Jean-Marc

    Merci Lomig de nous servir ce sujet d’actualité, qui nous amène à  réfléchir sur les définitions. Avant de parler de Google, je souhaiterais questionner la définition du « marché ». Le marché est un processus : c’est très important de le rappeler. Ce processus est régit par une seule loi : la loi de l’offre et de la demande. Une loi neutre, basée sur un principe de liberté qui n’est ni bien ni mal. Le marché est composé d’acteurs qui ont des intentions qu’ils déclinent en stratégie. Il apparaît des jeux d’alliance et de coopération et des jeux antagonistes et de combat. Ce processus se déroule sur un théà¢tre d’opérations o๠les plus forts gagnent en éliminant les moins performants. Cela me fait penser au conflit. Il y a la guerre qui est un acte politique relié à  une volonté de domination et le combat qui est le processus. Est ce que l’intention, la stratégie des différents acteurs n’est pas la même pour tous à  savoir : « augmenter sa puissance de domination » ? Est ce la loi de la nature ? Est ce que « l’humanisme » est, dans sa définition, une riposte à  cette loi du plus fort ?

    1. Avatar de BLOmiG

      salut Jean-marc, et merci pour ton commentaire !
      je partage ton avis sur le fait que les marchés, ou que la logique de marché est adossée à  une loi d’échange libre (offre et demande). Par contre, du coup, je trouve que ce principe n’est pas « ni bien ni mal » (c’est ce que disait Comte-Sponville, en gros le capitalisme n’est pas moral ou immoral, il est a-moral). J’utilise indifféremment « capitalisme » et « économie de marché » parce qu’ils sont synonymes. Je crois que c’est faux ; un principe de liberté d’action des individus, dans le cadre du respect de l’état de droit, me semble au contraire profondément moral. Le libre échange, basé sur la liberté, me parait moral. Il y a un présupposé, assez lourd de conséquences, qui est que 1° la liberté des individus est importante et est d’une manière ou d’une autre un « Bien », et que 2° le droit de propriété est un droit « naturel » des individus dans un sens élargi (la propriété commençant par le propriété de soi, de son corps, des ses actions, et se prolongeant par la propriété des fruits de son travail ou des fruits de ses échanges libres.
      Le mécanisme d’offre et de demande librement régulées est neutre certes ; mais il présuppose un système juridique et institutionnel particulier, qui est en partie moral, et adossé – pour faire très vite – aux droits de l’homme.
      Tout ce que tu dis sur le conflit est également vrai, mais discutable, pas au sens o๠ça serait dénué de sens, mais au sens o๠ça pose une vraie question de fond : le commerce est-il un conflit (le champ sémantique que l’on utilise pour décrire le jeu économique est souvent dans ce registre d’ailleurs), ou est-il un échange libre. Je pense, et en cela je suis libéral, que l’échange libre n’est pas un conflit, fondamentalement. QUe le commerce et les échanges libres permettent à  certains de s’y adonner à  des fraudes, ou à  des guerres de domination, c’est un point important ; je ne suis pas sà»r qu’il résulte de la nature du commerce.
      Un économiste politique Frédéric Bastiat avait résumé cela en une phrase (réductrice forcément)  » Dans la guerre, le plus fort accable le plus faible. Dans le travail, le plus fort communique de la force au plus faible. Cela détruit radicalement l’analogie. « .
      (le texte complet : http://bastiat.org/fr/domination_par_le_travail.html)

      voir cette pensée détaillée ici chez Philippe Silberzahn, avec d’autres angles d’attaques… : http://philippesilberzahn.com/2011/04/04/economie-est-pas-la-guerre/

      Pour répondre à  ta dernière question : oui l’humanisme est une riposte à  la loi du plus fort, qui n’est pas la loi de l’échange libre. L’échange libre est une des activités compatible avec un droit identique pour tous, et donc avec l’humanisme…

  2. Avatar de fcharles

    Effectivement cela fait du bien de rappeler les fondamentaux.
    J’ajouterai que si en plus le système éducatif public ne prépare pas au numérique (et qu’heureusement que le privé s’en est emparé), sans bagage economique et numérique, les écoliers d’aujourd’hui vont être de plus en plus démunis pour aborder le monde du travail dans lequel ils vont rentrer.
    Sauf peut être dans la fonction public.

    Et c’est peut être ça le problème. Nous savons produire des Google et Facebook en taille, mais ce sont des administrations. Elles visent une mission, qu’elles atteignent avec plus ou moins de succès, mais n’intègrent pas les dimensions économiques et numérique. Notre système de santé ou éducatif en sont des exemples ont été enviés/copiés par de nombreux pays. Ils ne le sont plus.

    Sinon sur le sujet de la régulation de Google, j’ai aussi sur mon blog une autre analyse sur la relation entre les GAFAs et les citoyens qui n’a pas de rapport avec l’économie mais plus avec la politique, au sens vie de la Cité.
    http://www.zdnet.fr/actualites/pourquoi-google-et-les-gafas-derangent-les-politiques-europeens-39810453.htm

    1. Avatar de BLOmiG
      BLOmiG

      Bonjour fcharles,
      merci pour ton commentaire !

      Pour reprendre ta comparaison entre GOogle Facebook et nos administrations, il y a une différence de fond qui empêche de pousser plus loin la comparaison/analogie : les administrations se renforcent par le pouvoir de coercition de l’Etat (personne ne peut vraiment s’y opposer sauf par la voie électorale), tandis que les entreprises concurrentielles poussent par les services qu’elles rendent à  leurs clients.
      Je fonce lire ton article et j’essayerai de participer à  la discussion (si je peux bien sà»r y apporter quelque chose).
      à  bientà´t

      1. Avatar de Jean-Marc
        Jean-Marc

        Difficile de contre-argumenter tous ces propos rationnels et avec lesquels je suis en accord. Mais le débat autour de l’évolution hégémonique de Google ne serait-il pas d’ordre émotionnel ? La monnaie d’échange des services ultra performants de Google est notre vie privée. Et c’est bien, me semble-t-il, la nature opaque de cette transaction qui génère de la peur et des crispations ; sans doute plus que la puissance financière de la société Google. La transaction ne se fait plus via une monnaie mais via des données personnelles. Est ce que ce n’est pas ce nouveau modèle économique qui tend à  se généraliser qui fait peur ? Cette peur est-elle justifiée ?Qu’en penses-tu ?

        1. Avatar de BLOmiG

          Salut Jean-Marc,
          désolé j’avais encore loupé le commentaire…
          oui je suis d’accord la peur n’est pas très rationnelle, et la réaction est émotionnelle. Nous échangeons – librement – des données « personnelles » contre des services. certainement il y a une partie des utilisateurs qui ne sont pas « conscients » de faire cet échange, et qui pensent bénéficier d’un service « gratuit ». Cet échange n’en reste pas moins libre et non forcé.
          Par ailleurs, la transaction continue de se faire d’une manière ou d’une autre, et entre certains partenaires via la monnaie habituelle : sinon Google n’aurait pas les moyens financiers qu’il a. La publicité reste un moyen de rentrée de cash.
          A vrai dire tout cela ne me fait pas très peur. Ce qui me fait peur, c’est l’ignorance et l’obscurantisme. Il faut donc éduquer, éduquer, éduquer. Ce n’est pas en empêchant Google d’agir que nous éduquerons les gens. Mais plutà´t en informant sur le modèle de Google, en se questionnant dessus, y compris individuellement. Quelles données suis-je prêt à  partager pour bénéficier de services ? o๠se situe maintenant la limite entre le privé et le public ? Il me semble qu’internet force à  se questionner sur ces limites mouvantes : le monde est rentré chez nous, avec notre consentement, et Google n’est pas responsable de cela. A nous de gérer ce qui dans nos actes et nos pensées, doit faire partie de ce vaste réseau, pour le meilleur et en évitant le pire…
          et toi ? qu’en penses-tu ?

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