A quoi sert le ministre de la culture ?

Ministre de la culture. Rien que l’appellation est ridicule. Les différentes politiques culturelles mises en oeuvre depuis 1959 n’ont servi à  rien. La lettre de mission que Nicolas Sarkozy a adressé à  Mme Albanel le rappelle :

En 1959, Malraux définissait ainsi les missions du nouveau ministère des affaires culturelles : « rendre accessible les oeuvres capitales de l’humanité, assurer la plus vaste audience à  notre patrimoine culturel et favoriser la création des oeuvres de l’art et de l’esprit qui les enrichit ». […]

Les acquis de cette politique sont considérables : une offre foisonnante, des musées et des monuments rénovés, un cinéma rivalisant avec la production internationale. Ces succès ne doivent pas faire oublier les lacunes et les ratés : un déséquilibre persistant entre Paris et les régions, une politique d’addition de guichets et de projets au détriment de la cohérence d’ensemble, une prise en compte insuffisante des publics, et surtout l’échec de l’objectif de démocratisation culturelle. De fait, notre politique culturelle est l’une des moins redistributives de notre pays. Financée par l’argent de tous, elle ne profite qu’à  un tout petit nombre.

[…] Il vous revient de proposer les voies et moyens d’une politique culturelle nouvelle, audacieuse, soucieuse de favoriser l’égalité des chances, d’assurer aux artistes une juste rémunération de leur travail, de développer la création et nos industries culturelles, de s’adresser à  tous les publics.

On retrouve la logique constructiviste de Malraux, cette logique qui a la prétention de croire qu’il est possible de piloter la production culturelle, sous toutes ses formes. Et qui veut faire croire qu’en perfusant le domaine de la culture avec de l’argent public on parviendra à  autre chose qu’à  un désastre. Si une oeuvre n’intéresse personne, au nom de quoi faut-il la subventionner ? Et si elle intéresse un public, comment croire qu’il n’y aura pas des producteurs suffisamment intelligents pour la produire et gagner de l’argent avec ?
Il n’y a aucune justification morale ou politique à  ce que l’argent du contribuable serve à  « assurer aux artistes la juste rémunération pour leur travail », ou à  « développer les industries culturelles ».
Et que je sache, ce n’est pas la France qui a produit Eternal Sunshine of the Spotless Mind, ou Little Miss Sunshine. Coltrane ou Madonna n’ont pas eu besoin de subventions pour travailler, créer des oeuvres originales, et convaincre leur public de les acheter.
A quoi sert le ministre de la culture ? A rien.

Commentaires

  1. Avatar de jacques

    C’est sà»r qu’il vaut mieux pour vous détourner la conversation avec un billet de ce genre, complètement indigent, que de revenir sur la crise d’aujourd’hui et ses raisons qui deviennent chaque jour un peu plus évidentes: la faillite du système pour lequel vous militez sans relà¢che…
    jf.

  2. Avatar de penthievre
    penthievre

    @LOmiG,
    Je partage totalement ton analyse de la situation de l’intervention de l’Etat dans le domaine culturel.
    L’argent public n’a rien à  faire dans la subvention d’oeuvres qui n’intéressent personne. Si la création en question satisfait des consommateurs d’oeuvres (des acheteurs) ou d’expositions de tel ou tel artiste, grand bien leur fasse, aux uns et aux autres; il n’y a pas de doctrine culturelle, que je sache.
    Par ailleurs, je voudrais dire deux choses sur les musées.
    J’ai pu visiter le palais du Tau, à  Reims, o๠était exposée une oeuvre (assurément subventionnée par le ministère et consorts régionaux) au beau milieu de la chapelle, composée d’un enchevêtrement de tubes néon montés sur un chassis d’échaffaudage. Et il y avait une notice expliquant le génie de l’artiste dans la recomposition de la lumière.
    Pour moi, c’est du foutage de gueule pà»r et simple, à  mes frais.
    Deuxièmement, je suis assez assidu des musées parisiens, comme de province proche. Je dois dire que la fréquentation y est quasiment nulle (il y a plus de gardiens que de visiteurs), en dehors des grands musées
    classiques o๠il y a plus d’étrangers que de contribuables. Même les musées d’accès gratuit à  Paris (Carnavalet, Cognacq-Jay, Soubise), ainsi que ceux de province à  4 € l’entrée sont désespérément vides de visiteurs!
    Mais que fait donc le ministère de la culture? N’importe quoi, mais pas rien, avec l’argent public.
    Notez que très rares sont les pays occidentaux à  disposer d’un ministère plein de la culture.
    Encore une exception française que tout le monde nous envie.

  3. Avatar de Jean-no

    L’argent du ministère de la culture ne sert pas à  subventionner « quelques artistes », c’est une légende démagogique. Sarkozy flatte les peintres du dimanche qui pensent qu’on s’intéressera à  eux une fois que l’art contemporain aura disparu, et qui pensent que le noeud du problème, ce sont les subventions. C’est tout à  fait irréaliste.
    Les plus grosses subventions directement données à  des artistes – en contrepartie d’un travail bien entendu -, c’est le « 1% culture » : un pour cent du prix d’une construction publique (éducation, culture, intérieur) doit servir à  financer une oeuvre artistique originale. C’est une idée comme une autre, ça coà»te plutà´t moins cher en moyenne qu’un terre-plein ou un carrefour.
    Mais à  quoi sert exactement le ministère de la culture ?
    Il centralise les question de développement culturel (écoles, conservatoires) et encadre la pédagogie de ces établissements, enfin de ceux qui souhaitent profiter des diplà´mes nationaux (DNSEP en art par ex). Il sert aussi au patrimoine ! Le Louvre, Orsay, Beaubourg, c’est financé comment à  votre avis ? Cette politique qui, dites-vous, « ne sert à  rien » aboutit tout de même à  ce que Paris soit la ville qui a le plus de musées au monde et, on peut penser que c’est lié, la capitale planétaire du tourisme (qui « sert » à  quelque chose économiquement, non ?).
    Le ministère de la culture ne fait pas que développer les oeuvres « élitistes », il avance de l’argent à  tout le secteur de l’édition (CNL) et à  celui du cinéma (CNC). Argent qui permet à  des blockbusters de se monter mais aussi à  des petits films d’exister et d’être vus. Ces lois qui relèvent du protectionnisme économique permettent à  la France d’être l’unique pays européen à  avoir un cinéma et à  voir ce dernier, tandis que des pays au cinéma intéressant (Allemagne, GB,…) sont laminés.
    Vivre sous la coupe du cinéma américain est un problème économique mais aussi idéologique : le fascisme discret de « Air Force One » ou de « Furtif », l’échelle de valeurs américaine, doivent-il vraiment être généralisés au monde entier ? Au nom de la liberté de penser, j’espère que non.
    Je connais bien le ministère de la culture, je travaille avec, et même pour puisque c’est un de mes ministères de tutelle en tant que prof d’art, et il me semble qu’il est assez pauvre par rapport à  l’étendue de sa mission, et finalement plutà´t efficace et avantageux pour l’économie française. Comparez au malheur de l’Italie, devenu une sorte de cimetière des éléphants de l’art, vous m’en direz des nouvelles.
    Je suis toujours étonné par l’usage de ce miroir aux alouettes qu’est le ministère de la Culture : il ne ruine pas la France et il n’est pas inefficace. Toutes ses missions sont-elles utiles ? Je ne sais pas, c’est une question de choix, mais la France reste respectée dans le domaine culturel, malgré son négligeable poids économique. Ce n’est certainement pas dà» que à  la politique culturelle (la Norvège dépense bien plus d’argent et n’est pourtant pas un pays plus important dans le domaine) mais je pense que ça y contribue.
    Je pense aussi que face à  la star ac’, il faut conserver des orchestres nationaux, que face aux bétonneurs, il faut restaurer les chà¢teaux, les peintures et les tapisseries. Lorsqu’on laisse tout ça au privé, cela aboutit à  des résultats différents , de court terme (comme la restauration ultra médiatisée des Noces de Cana de Véronèse) et de courte vue, dont le but est un retour sur investissement immédiat… Système qui n’est franchement pas adapté à  tous les cas.

  4. Avatar de Gruik
    Gruik

    Voici un article intéressant de Martin Masse sur le sujet :
    http://www.quebecoislibre.org/990612-9.htm
    @J-no : le budget du ministère de la culture est d’environ 3 milliards d’euros pour 2009. 3 milliards, c’est 50 € d’impà´ts par français, tout à¢ge confondu. Si cette somme leur était reversée, ces derniers pourraient choisir de l’orienter librement selon leurs besoins, culturels ou non. Il y aurait aussi une place bien plus grande pour le mécénat.

  5. Avatar de Jean-no

    Notez au fait que les artistes, les amateurs d’art, les acteurs du monde de la culture sont aussi des contribuables. Ils sont sans doute plus nombreux que vous ne l’imaginez.
    Personnellement je déteste le sport, mais il me semble normal que l’on construise des stades car ça concerne des gens.

  6. Avatar de Jean-no

    @Penthievre : tiens tiens, deux des trois musées que vous citez ne sont pas sous tutelle du ministère de la Culture ! Vous pouvez reprocher son action au ministère mais quand même pas sur la foi des erreurs d’autres instances (ville de Paris, en l’espèce). Quand à  l’hà´tel Soubise, oui, les archives nationales tout le monde s’en fiche. Faut-il pour autant les laisser choir ? Comparez aux à‰tats-unis : proportionnellement ce genre de musée y a moins de public mais reçoit une plus forte dotation !

  7. Avatar de pebnthievre
    pebnthievre

    @Jrean-no,
    Tu manques juste de l’approche de rentabilté économique du système culturel , qui un bien marchand .Qui gagne quoi dans l’affaire? les visiteuurs ou les artistes?
    Bien sur que la contribution nationale peut particper à  l’offre, mais, juste dans les limites d’une doctrine imposée, ce qui n’est pas franchement pro^posé aux électeurs.
    Tu veux bien mettre la star-ac hors de ces propos?
    Nous en sommes malheureusement à  ce poinr là !
    et Sarkozy le premier.

  8. Avatar de jean-philippe

    Génial ! je vous découvre par le biais de Falcon ! et je me régale ! c’est bien tourné ! bien documenté et nous arrivons tout deux à  la meme conclusion : le ministre de la culture (surtout l’actuelle ministre ) ne sert à  rien !!
    bravo !!

  9. Avatar de Jean-no

    Cinquante euros par an et par contribuable ! mazette ! Bon en même temps ce n’est qu’un pour cent du budget… Dont le premier poste est le remboursement de la dette publique, soit 83 milliards (1200 euros par contribuable et par an), que nous devons à  la gestion inspirée du pays sous l’administration du ministre des finances Sarkozy et du président Sarkozy (la dernière fois que la dette s’est tassée c’est sous Jospin).
    Cela m’embête plus de rembourser des intérêts (moi qui mets un point d’honneur à  ne jamais contracter de dettes) que de claquer 50 euros par an dans la culture : enseignement de l’art, patrimoine et aide à  la création. Chacun ses priorités. On peut considérer que l’art constitue une forme de gà¢chis : ça ne se mange pas, ça ne sert pas à  tuer des gens, à  quoi ça sert ? Mais en même temps c’est une des rares choses qui nous distinguent des autres singes, et le fait est que, publique ou privée, la création est un besoin humain (toujours existé).
    Par ailleurs, l’argent public ne sert pas à  donner aux gens ce qu’ils veulent, ce n’est pas un comité d’entreprise qui distribuerait chaque année au contribuable une place pour Johnny ou pour Disneyland, c’est une instance qui participe à  des efforts qui ne peuvent pas nécessairement être faits autrement. Pour arriver à  un truc tel que le Louvre il a fallu 200 ans de politique culturelle, de Vivant-Denon à  Christine Albanel, et aussi des sommes extravagantes. Je suis content de pouvoir aller admirer un Titien ailleurs que dans le bureau de Bolloré (qui ne m’invite jamais d’ailleurs), il me semble que ça vaut bien les 50 euros.

  10. Avatar de Criticus

    @ Lomig
    Désolé, là  tu es simpliste : tu parles de Malraux, mais celui-ci avait sauvé le quartier (Renaissance) Saint-Jean-Saint-Paul de Lyon, menacé de destruction par un projet autoroutier. Le patrimoine n’est pas qu’une histoire de choix individuels.

  11. Avatar de Jean-no

    La Star Ac’ n’est pas hors sujet, c’est ce qui arrive quand on donne aux gens ce qu’ils demandent et qu’on en espère un retour sur investissement rapide. Financer un orchestre national classique, en revanche, ça coà»te plus que ça ne rapporte. Mais ça permet à  tout un répertoire de vivre ailleurs que sur des disques.
    pour la question Qui gagne quoi dans l’affaire? les visiteuurs ou les artistes?, je pressens que nous arrivons aux arguments du type Combien ça coà»te?. Qui palpe? Qui profite? Mouais.
    Je peux cependant y répondre avec un chiffre assez marquant : il y a quelques années, un sociologue du monde de l’art m’expliquait que le nombre d’artistes gagnant assez d’argent pour être imposables en France était d’environ cent personnes – chiffre très stable – et que cela concernait notamment des gens comme Toffoli qui n’ont rien à  voir avec l’argent public. Je ne trouve pas le chiffre énorme.
    Ensuite, plus intéressant, combien ça rapporte ?
    Déjà  quelle est la mission d’un état en matière de culture ?
    Les US font croire qu’ils ne subventionnent pas la culture mais c’est tout à  fait faux, au contraire ils ont réussi à  prendre le pouvoir dans le monde culturel (contre la France principalement) grà¢ce à  un savant dosage d’interventionnisme (quand il faut conquérir) et de libéralisme (quand le domaine est conquis), comme ils le font dans toutes les matières économiques. En France les services secrets ne financent pas des artistes a priori, alors que c’est une ruse qu’a employé la CIA (cf. le beau doc passé sur Arte à  ce sujet il y a un certain temps). En un siècle les US se sont appropriés l’art moderne. Fort. Cela ne leur rapporte pas directement d’argent mais le bénéfice symbolique est énorme : les yeux sont braqués vers New York et plus vers Paris.
    Mais l’art contemporain et les artistes sont une toute petite part de l’activité du ministère de la Culture. Outre le patrimoine (utile ? important ? rémunérateur ? Tout ça se discute), l’enseignement de l’art fait partie de ses buts : 60 écoles territoriales sous tutelle, une dizaine de nationales sous administration directe, ces écoles d’art visuel forment les futurs graphistes, décorateurs, etc. (des « vrais métiers » hu hu) qui ont à  leur tour un poids économique non négligeable notamment dans la sphère privée. Alors de quoi parle-t-on ?
    Si trois milliards d’euros servaient à  financer quelques expositions que personne ne va voir chaque année, ok, ce serait scandaleux. Mais le ministère de la culture et de la communication, ce n’est pas du tout ça.

  12. Avatar de Jean-no

    @Criticus: selon une certaine logique, on s’en fiche du quartier Saint-Jean Saint-Paul tandis que les autoroutes servent à  quelque chose et rapportent de l’argent. Tout est question de choix. Depuis Malraux, en dehors du navrant épisode Léotard, les ministères de la culture ont toujours cru qu’ils servaient à  quelque chose et agi en conséquence, que ce soit de droite ou de gauche. Une telle permanence devrait faire réfléchir : c’est sans doute parce que c’est ce que les gens veulent, au fond.
    Récemment, quelqu’un m’a dit qu’il était scandaleux que l’artiste qui reçoit le Prix Marcel Duchamp des mains du ministre de la culture soit doté de 50 000 euros et de l’aide à  la production d’une exposition à  Beaubourg à  hauteur d’une somme équivalente. Comme souvent en matière de culture, cet amateur de foot était mal renseigné : la dotation émane d’une association privée de collectionneurs et de mécènes.

  13. Avatar de Jean-no

    Encore un détail (désolé, je n’arrête pas) sur le film « Eternal Sunshine of the Spotless Mind ». C’est une production américaine, qui a permis à  deux artistes français d’obtenir un oscar : Michel Gondry, qui n’a jamais couru derrière les subventions (mais qui en a touché pour Science of Sleep) et Pierre Bismuth, un artiste contemporain français formé à  l’école nationale supérieure des Arts décoratifs (ministère de la culture), qui a développé son oeuvre dans des galeries privées… ou dans des galeries dépendant du ministère de la culture (Fracs et autres). Sans le ministère de la Culture, ce jeune homme aurait-il abouti aux Academy Awards et est-ce que le film aurait exisé ? Je n’en sais rien, mais le fait est que ce ministère a eu une influence sur son parcours.

  14. Avatar de penthievre
    penthievre

    @Jeanb-no;
    et si on laissait chacun vivre de son art; il n’y auraîit point besoin de support public.
    Chacun y trouverait ce qu ‘il souhaite, les amateurs comme les déterminés non interressés.
    Moi, personnellement, je ne souhaite pas subventionner des conneries.

  15. Avatar de Jean-no

    @Penthievre: Le rà´le de l’état est de faire ce qui ne saurait exister par le seul effort individuel ou privé. Creuser des canaux, construire des routes, etc. Mais une société ne peut se contenter de projets « alimentaires », il faut aussi laisser quelque chose, et l’art sert à  ça. Tous les chefs d’état le savent : les dirigeants ou les cultures qui sont restées sont ceux qui se souciaient d’art : Périclès, Alexandre, Rome, les Omeyyades, la papauté, Lorrenzo Medici, François 1er (grand subventionneur s’il en est), Louis XIV,… Il n’y a pas d’exception, même chez les pires despotes d’ailleurs. Et les politiques culturelles les plus intéressantes sont celles qui ont suscité la création sans faire sombrer le patrimoine. Voilà  la problématique.
    Ensuite, est-ce que tous les choix du ministère de la Culture sont avisés ? Sans doute pas. Est-ce qu’il sert à  « subventionner des conneries » ? Je pense que tu parles avant tout par manque d’information et de vision d’ensemble. Le ministère de la culture s’occupe d’un très grand nombre de choses très diverses, tu le réduits à  quoi… Une vague expo d’art conceptuel visitée par hasard et qui t’a révolté ? Mouaif.

  16. Avatar de Gruik
    Gruik

    D’après ce site, le budget de la culture (tout compris) serait en fait de 11 milliards d’€ par an, soit 175 € par an. Jusqu’à  combien d’€ doit-on faire un chèque en blanc à  l’administration pour gérer la culture ?
    Que ça ne dérange pas Jean-No de payer cette somme, tant mieux pour lui. Mais si moi, je ne suis pas d’accord ?
    http://www.ifrap.org/CULTURE-les-ravages-de-l-argent-public,0387.html

  17. Avatar de Jean-no

    La page en question n’explique pas spécialement bien le chiffre de 11 milliards. Ce n’est pas ce que j’appelle un argument. Et nous sortir ce réac’ magnifique de Marc Fumaroli qui considère que rien, sur aucun média, ne s’est fait depuis le Grand Siècle, hmmm… Bon…
    Alors la question que tu poses touche aux fondations de la démocratie : si tu n’es pas content ? Tu le dis (c’est fait), tu votes pour un président qui déteste la culture (pas besoin, il est élu), tu fais savoir au maire de ta commune qu’il n’est pas question de remplacer la foire à  la saucisse par une projection en plein air d’un film en noir et blanc (non mais ça va la tête), mais à  vrai dire tu as peu d’autres recours. Alors imagine mon cas : je déteste la dette publique, le sport, la voiture et la guerre, pour lesquels l’état claque bien plus que pour la culture.

  18. Avatar de jacques

    Il est bien ce Jean-No !!! Je l’approuve !
    jf.

  19. Avatar de AsTeR

    Je te suis pas vraiment Jean-no. L’idée n’est pas d’aimer ou non la culture, c’est de savoir si l’état doit s’en mêler ou non.
    Moi ça ne me plait guère d’avoir un cinéma sponsorisé, surtout quand on voit la plupart des merdes qui en sortent. Le financement de la dite culture implique aussi généralement un choix purement subjectif, sur qui, quoi et sur combien… En clair, tu diffuses des choix culturels, qui sont biaisés ou politiques. La culture c’est tout et c’est rien à  la fois !
    Pour avoir organiser quelques événements dans ce domaines et parlé avec un peu de monde, je peux te dire que l’argent public est vachement bien utilisé pour des coups de pub personnels ou par des personnes dont le seuls mérite est d’avoir demandé ou d’avoir plus de réputation que d’autre.

  20. Avatar de Jean-no

    Le financement du cinéma français n’est pas forcément ce que tu crois. Tout d’abord il touche 100% des films, y compris certains films non français mais majoritairement produits ici. Ensuite il s’agit pour la plupart des cas d’une avance sur trésorerie : l’état rentre dans ses frais. Voir le site du CNC pour en savoir plus http://www.cnc.fr/
    Mais ce n’est pas tout. Le but de ces avances est simplement d’échapper à  la domination américaine dans le domaine de l’industrie culturelle, et ça, c’est un succès, avec l’Inde nous sommes un des rares pays au monde dont le cinéma national existe un peu. Malraux et De Gaulle ont lancé ça en 1960 pour une raison précise : l’indépendance de la France vis à  vis des à‰tats-Unis.
    Maintenant, j’entends bien qu’on ne soit pas d’accord avec une telle ingérence, mais dans la « paix » inamicale que vivons avec les à‰tats-Unis depuis cinquante ans, il s’agit pour ainsi dire de défense nationale, c’est tout comme disposer d’une armée, car la guerre économique se fait notamment sur le terrain culturel.
    Pour ce qui est de tes infos de première main sur le monde de la culture, je pense que j’en ai de meilleures et que ton analyse ne fait que répéter un cliché. J’ignore si tous les fonds utilisés pour la création sont bien utilisés, mais partout o๠j’ai travaillé (Beaubourg, l’Ircam, divers centres nationaux d’art, les écoles), j’ai trouvé tout le monde très sérieux, à  commencer par les artistes. Et il m’a souvent semblé aussi qu’il manquait de l’argent plutà´t que le contraire.
    Je ne connais que la situation des arts plastiques (la musique ou le théà¢tre, je ne connais que de l’extérieur), mais je ne vois pas d’indices de gabegie généralisée.
    Je comprends très bien qu’on se dise que l’art n’a pas à  être subventionné, ni l’école, ni la justice, ni la police, que chacun devrait s’occuper de ses affaires. Néanmoins ce sont d’autres choix qui ont été faits ici pour l’instant et à  mon avis, tant mieux. Du reste je me demande bien à  quoi sert un état qui refuserait d’avoir une influence sur la société.

  21. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    héééé bé ! On dirait bien Jacques que ton avis est isolé : la discussion est partie très fort sur ce sujet !
    merci à  tous pour vos commentaires. Je n’ai pas revenir ici hier soir, et je découvre toute la discussion d’un coup.
    Merci à  Grouik pour le lien excellent vers le texte de Martin Masse.
    Merci et bienvenu à  Grouik et jean-philippe !
    @ Jean-no : c’est amusant parce que tu cites dans tes exemples le truc que j’allais donner en exemple : L’IRCAM ! Voilà  typiquement le genre de trucs qui est incroyablement choquant. M Boulez récupèrait chaque année des millions pour produire une musique – peut-être géniale, ce n’est pas à  moi de le dire – qui n’intéresse personne, à  part quelques intellectuels fortunés (et à  nouveau je ne juge pas cela, on aime ce qu’on veut. Simplement on ne demande pas aux autres de le financer pour nous). L’ircam est un institut qui a des dizaines de compositeurs, de techniciens, etc. Je suis allé à  la journée porte ouverte : on a très franchement l’impression d’assister à  la réunion d’un groupe d’hurluberlus très forts en musique, qui se font plaisir, et qui n’en ont rien à  foutre du public. A nouveau, en quoi l’argent du contribuable doit-il financer cela ?
    Par ailleurs, ne caricature pas mon propos : je n’ai pas parlé dans ce billet de l’école, ni de la justice, ni de la police. J’ai parlé de la culture. Et un état qui refuserait d’avoir une influence sur la société servirait à  maintenir la sécurité intérieure (police, justice). A défendre la sécurité extérieure (diplomatie, défense). Et sur l’instruction ou l’éducation, j’admet qu’il y a débat. Sur les autres sujets, j’avoue être perplexe de voir qu’il est si facile pour la plupart des gens de considérer que la solution collectiviste est la meilleure, même avec sous les yeux des dizaines de preuves qui montrent le contraire…
    @ Criticus : tu sais bien que je suis simpliste. Mais ton exemple n’est pas un réel argument. Qui te dit que celà  n’aurait pas pu être fait par un (des) acteur privé (mécénat). L’argent prélevé et dépensé c’est ce qu’on voit. Tout ce qui pourrait être fait avec cet argent s’il était laissé à  ses propriétaires, c’est ce qu’on ne voit pas. Grouik l’a rappelé en début de discussions fort à  propos, je trouve.
    @ Tous : juste une précision. Ma réflexion partait aussi du fait suivant : la culture, au sens large, est quelque chose de vivant, et qui bouge qui évolue. Un ministère de la culture ne peut à  mon sens que préserver ce qui existe déjà . Et s’il se mêle de faire émerger des choses, je ne vois pas comment il pourrait être plus efficace que le public et le marché pour cela.
    à  bientà´t, merci à  tous
    merci encore penthièvre pour ton article, je fonce le commenter !

  22. Avatar de EtienneB

    Qu’elle pays a encore un secteur culturel dans la langue du pays à  part la France ?
    La plupart des pays qui n’ont pas eu une politique proche de celle de la France sont annexés culturellement aux Etats-Unis.
    Notre politique culturelle est un des trucs qui fonctionne très bien dans notre pays (il y a des améliorations à  faire, notamment sur la redistribution, la démocratisation, le théà¢tre à  la télé est une très bonne chose par exemple).
    D’ailleurs, d’autres pays copies notre système, n’est-ce pas la preuve qu’il est compétitif ?

  23. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    salut Etienne,
    c’est toujours la même rengaine : l’annexion culturelle par les USA. ça me fatigue ! Oui les USA produisent des grosses merdes de consommation de bas étage, MAIS ils produisent aussi des chefs d’oeuvres à  rayonnement international. Leur culture ne s’impose pas par les armes, mais par sa force et son adaptation à  ce que les gens attendent. J’ai volontairement cité dans mon article quatres exemples de produits de la culture américaine (il y en a de nombreux autres). La culture américaine est une culture bien riche, à  l’heure actuelle, que la culture française.
    En ce qui concerne le théà¢tre à  la télé, cela ressort du goà»t privé. Le mieux est qu’une chaine produise cela de manière rentable, et qu’elle fasse payer à  ceux que ça intéresse ce genre de spectacle. Par exemple, moi, j’en ai pas grand chose à  faire d’avoir du théà¢tre à  la télé, surtout si ça doit me coà»ter de l’argent, et servir à  financer des intellectuels dont les goà»ts du public sont le dernier de leur souci.
    à  bientà´t !

  24. Avatar de Etienne

    J’ai pas dit le contraire ;) (mais en même temps, tu sais très bien que ce qu’ils exportent, c’est surtout la merde ;))
    Mais moi je suis un chauvin, donc je prefère encore qu’on finance de la merde française (Plus Belle la Vie) pour éviter la merde américaine (Desperate Housewives) avec le bagage culturelle américain (la femme à  la maison, la société de consommation frénétique, etc)
    Le soft power américain, ne me prend pas pour une buse…

  25. Avatar de Gruik
    Gruik

    @ Etienne : tu préfères qu’on finance de la merde française (Plus Belle la Vie) pour éviter la merde américaine (Desperate Housewives).
    Donc en somme, tu prétends qu’il faut prendre de force de l’argent dans la poche des gens parce qu’ils ont le culot d’avoir des goà»ts qui ne sont pas les tiens… Qu’est-ce, sinon du mépris et de l’égoïsme de ta part ?
    Tu dis : »Qu’elle pays a encore un secteur culturel dans la langue du pays à  part la France ? »
    Euh…
    L’Inde (800 films par an, 2 fois plus qu’aux USA),
    la Corée du Sud,
    la Thailande (50 films par an, notamment plein de films de fantà´mes et de comédies lourdingues dont les locaux sont friands),
    l’Italie,
    l’Espagne,
    l’Iran (Kiarostami I love you),
    le Japon,
    Taiwan (Hou Hsiao Hsien, et surtout la jeune génération qui débarque en force),…
    Ca te suffit ?

  26. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    Merci d’afficher tout ton dogmatisme en plein jour. ça facilite les échanges de savoir à  qui l’on parle.
    Merci Grouik de rappeler les vérités factuelles. Je ne suis pas sà»r qu’Etienne y sera sensible.
    Par ailleurs, Desperate Housewives est une série d’une qualité infiniment supérieure à  « plus belle la vie », et il faut vraiment être aveuglé par un dogmatisme anti-US aveugle pour ne pas s’en rendre compte.
    à  bientà´t !

  27. Avatar de jacques

    Parce que c’est le Ministère de la Culture qui « subventionne » « Plus belle la vie » ????? Première nouvelle !
    Pour ma part je ne me sens absolument pas isolé. Ayant eu le « privilège » de commeter en prem..je m’aperçois que Jean-No a bataillé ferme contre l’indigence du billet et du débat, et qu’Etienne est arrivé dans ce même état d’esprit.
    jf.

  28. Avatar de manuel

    « Plus belle la vie », c’est de la culture?…On est mal là !
    Gruik, je vais te répondre sur ce que je connais.
    La culture japonaise est en train de foutre le camp « grà¢ce » à  l’invasion culturelle américaine qui a mis le temps depuis 1945 mais qui finit quand même petit à  petit à  la faire disparaître, à  mon plus grand désespoir. D’ailleurs, il est apparu un mouvement marginal de repli sur soi, de nationalisme culturel, assez légitime mais pas assez étendu à  mon avis.
    La Thaïlande, et dans une moindre mesure la Corée, ont toujours copié sur le grand frère japonais.
    Bollywood… C’est la plus grosse industrie du cinéma au monde, inondant le cinéma et télés africaines, et orientales n’ayant pas assez de fric pour se payer hollywwod.
    C’est très dur de résister à  l’hégémonie culturelle américaine (de merde), et en France on est particulièrement résistant et atypique.
    Je ne dis pas que le ministère de la culture y est pour quelque chose, j’en sais rien, je ne me suis jamais posé la question.

  29. Avatar de Etienne

    @Gruik :
    Regarde la pénétration des films américains dans tous ces marchés…
    http://www.stat.gouv.qc.ca/observatoire/publicat_obs/pdf/Cine08_chap10.pdf
    Je ne connais pas assez le cinéma asiatique pour en parler, mais de ce que je sais, le cinéma coréen est en grande partie financé par l’Etat. Je ne sais pas ce qu’il en est pour les autres pays.
    Mais si l’on veut comparer, il faut prendre des pays comparables ! PIB par habitant proche, etc. Regarde donc le rapport que j’ai mis en lien, c’est très net.
    D’ailleurs, les américains ont un système financé en partie par le public…
    Et puis, si je préfère de la merde française, c’est parce que mine de rien, elle véhicule les valeurs de la France et non des valeurs américaines.
    Donc oui, je suis pour que les valeurs qui me tiennent à  coeur soit défendues par le financement de la culture en France. Ce n’est pas du dogmatisme mais du pragmatisme : la culture de masse est le soft power américain leur permettant de développer leur système dans le monde entier.
    Pour Desperate Housewives, je vois que j’ai touché un point sensible ^_^’
    C’est une apologie du système américain, admets le.
    Toi, ça ne te gêne peut-être pas, moi si.

  30. Avatar de Gruik
    Gruik

    @ Manuel : Ton post me laisse pour le moins dubitatif.
    Sur le Japon : l’invasion culturelle américaine que tu dénonces a tout de même donné lieu à  de sacrés chef d’oeuvres. Entre 1930 et 1990, Mizoguchi, Ozu, Fukasaku, Gosha, et surtout Kurosawa se sont inspirés de l’à¢ge d’or d’Hollywood pour des oeuvres aussi marquantes que Les 7 samourais, le goà»t du sake, Ran ou encore l’élégie de Naniwa. Ca n’en reste pas moins des films purement japonais. Concernant la nouvelle génération, Kitano, Kurosawa K., Sono Shion, Tsukamoto Shinya, Iwai shunji et j’en passe, c’est pas du poulet !
    Sur la Thailande : peux-tu m’expliquer en quoi elle copie sur le Japon avec ses films de fantà´mes et ses comédies typiquement thaies ?
    Sur l’Inde : tu es en train de dire que c’est du cinéma low-cost tout juste ragardable par des africains… (point de vue limite insultant). Je t’invite donc à  découvrir quelques chefs d’oeuvres comme la Famille indienne, Devdas, Lagaan, Mohabbatein, les films de Satyajit Ray, d’Adoor Gopalakrishnan, de Mani Ratnam, de Rituparno Ghsoh, et on en rediscute après, ok ?
    Sur la France : il va falloir que tu nous dises en quoi on est particulièrement atypiques. Asterix ? Les ch’tis ? Ou alors du Philippe garrel hué au festival de Cannes pour sa prétention incommensurable ?

  31. Avatar de Gruik
    Gruik

    @ Etienne :
    Sur la corée du sud : oui, le gouvernement finançait une partie des films et obligeait une proportion fixe de films nationaux dans les salles. Mais depuis quelques années, ce système a sauté (c’est d’ailleurs pour ça que Choi Min-sik a arrêté le cinéma pour protester).
    Sur les taux de pénétration du ciné US : je ne comprends pas o๠tu veux en venir. En quoi le fait que le public aime le ciné US est-il un problème ? Libre à  toi de regarder 100% de films français et de cracher sur Hollywood. Mais il y a aussi des gens qui regardent 100% de films américains ou indiens et qui se contrefichent du cinéma français. En quoi sont-ils moins dignes de respect que toi ? Ta position franchouillarde assumée contient une bonne dose de nationalisme protectionniste que ne renierais pas la droite de l’UMP, et au-delà …

  32. Avatar de manuel

    Sur l’Inde, j’ai vu Devdas , et le fait qu’elle inonde les marchés les moins riches est un fait, pas un jugement. Je dirais qu’après en avoir vu plusieurs (rigolo d’ailleurs) que ça ne vole pas très haut quand même… Amour impossible, famille super riche mais pas assez riche pour celle de l’époux, sentiments, happy end ou pas (Devdas). C’est du hollywood indien, rien à  voir avec la culture indienne. Je n’ai jamais vu de Devdas en Inde, il ne doit pas y en avoir tant que ça.
    La Thaïlande copie musicalement sur les « Idols » Japonais depuis les années 80′, mais aussi sur les séries télé à  l’eau de rose. J’ai pas de noms car je n’aime ni l’un ni l’autre, alors si tu ne me crois pas c’est ok, pas de preuve, mais juste du vécu dans ces 2 pays.
    Bon, alors sur le Japon, je te parle de la culture en général, pas uniquement cinématographique (plutà´t positive d’ailleurs). Les jeunes oublient leurs racines, leurs origines culturelles, leurs coutumes, éléments tellement importants de la société japonaise. Mac Do, Baseball et c… C’est juste que le jeune japonais veut être américain, il ne s’intéresse plus aux coutumes, aux rituels qui font partie intégrante de la société japonaise. Il y a un fossé gigantesque entre la génération 70′ et celle d’aujourd’hui, bien plus important qu’ici. Il n’arrivent pas à  garder leurs bases.
    Les U.S.A interviennent dans l’éducation scolaire, ont décidé d’un système politique qui déresponsabilise les gens. Le japonais se voit coupé de son identité pré-45 pour se voir assimilé par les U.S.
    Mon commentaire est très brouillon, je m’en excuse.

  33. Avatar de Etienne

    Quand on parle d’indépendance culturelle, ce sont les stats auxquelles ont se réfèrent généralement ;)
    De Gaulle disait : « le patriotisme, c’est l’amour des siens, le nationalisme c’est la haîne des autres ». Et bah je suis tout à  fait d’accord.
    Et non, je ne vais pas voir QUE des films français, je vais même voir pas mal de films américains, mas les blockbusters, la mass culture US, ça me lasse…
    Mais je trouve normal que l’on aide le secteur culturel français. Le marché culturel est une guerre, vous ne l’admettaient pas…

  34. Avatar de Gruik
    Gruik

    Sur Devdas, tu te plantes grave : c’est une énième adaptation d’un roman populaire indien écrit en 1917. Il n’y a donc pas plus indien que Devdas. Pour le reste, Bollywood ne représente qu’un quart de la production indienne.
    Sur le Japon : c’est quoi les bases japonaises pour toi ? Il faudrait que les jeunes de ce pays se baladent avec des sabres, des sandales en bois et se fassent hara-kiri à  chaque déshonneur pour « garder leurs bases » ?
    Entre parenthèses, on a aussi perdu nos bases en France : il y a 70 ans, Paris c’était le Moulin Rouge, les « petites femmes de Pigalle, les peintres et les restos de quartier typiques. Aujourd’hui, Paris est un musée dédié au tourisme, et Pigalle est une grosse arnaque.

  35. Avatar de Gruik
    Gruik

    « Le marché culturel est une guerre, vous ne l’admettaient pas… »
    Bien sà»r que si, on l’admet. On dit juste que cette guerre serait plus efficace sans intervention de l’Etat. Des sites comme Mymajorcompany le prouvent suffisamment bien : on peut trouver du pognon pour se faire financer sans passer par l’arbitraire de l’administration centrale.
    http://www.mymajorcompany.com/

  36. Avatar de Jean-no

    @LomG : l’Ircam est typique de ce dont on parle sans rien en savoir. J’ai longtemps fait pareil à  ce sujet, mais ensuite, j’y ai travaillé et j’ai donc pu apprécier les choses différemment. L’institut est très orienté « musique contemporaine » (qui, en dehors de Ligetti, Arvo Pà¤rt et Michael Nyman n’intéresse effectivement qu’un public restreint – mais certainement pas inexistant), mais ce n’est qu’une partie de ses activités, le grand intérêt de l’Ircam, qui découle de cette filiation « musique contemporaine », c’est un intérêt pour le son.
    Notez au passage que Boulez en a été directeur de 1970 à  1992, ça fait donc seize ans qu’il ne l’est plus.
    L’Ircam n’est pas une salle de concerts, c’est un centre de recherches o๠des ingénieurs dialoguent avec des musicologues et des musiciens. Il en est sorti de nombreux logiciels comme Audiosculpt ou Max (devenu un logiciel commercial à  succès, exploité par une société privée). C’est aussi un lieu qui accueille des chercheurs de 3e cycle en musique/musicologie/acoustique. Enfin, l’Ircam organise des ateliers pour apprendre le son aux enfants ou aux adultes. L’Ircam produit des choses, donc, des technologies et du savoir. Je ne pense pas que l’acoustique ou le design sonore soient des petits sujets dans notre monde actuel, alors pourquoi n’y aurait-il pas un centre de recherches pluridisciplinaire à  ce sujet ?
    Sur les autres postes (justice, police), je ne caricaturais pas ton propos, je dis juste que je comprends qu’on soit contre l’état, il y a de bonnes raisons de l’être. En matières culturelles aussi du reste. Un ministère de la culture dont il faudrait tout attendre serait dramatique.
    Mais tu commets une erreur d’appréciation à  mon sens qui est de croire qu’il y a quoi que ce soit de collectiviste là  dedans.
    Les trois missions du ministère sont donc le patrimoine, l’éducation artistique et enfin l’aide à  la création.
    Le ministère de la culture est un outil économique et culturel qui sert à  entretenir les biens immobiliers et artistiques du pays (évidemment, la Roumanie d’après Ceaucescu n’a pas besoin de même genre de budget pour ça) et donc à  accueillir du tourisme (qui emploie plus de français que le secteur automobile), à  entretenir aussi le patrimoine vivant (un orchestre symphonique, un corps de ballet, etc.).
    Est-ce que tout ça pourrait échoir au secteur privé sans pertes ? J’en doute un peu, cependant il y a sans doute plein de secteurs qui, à  un moment oà¹ à  un autre le pourraient. Mais si la Comédie Française existe sans discontinuer depuis 300 ans, c’est sans doute parce que ce n’est pas une affaire privée mais une institution d’état.
    Sur l’éducation artistique, je suppose qu’il n’y a pas grand chose à  dire, chacun en pense ce qu’il veut et, en tout cas, chacun a une idée de ce à  quoi sert un conservatoire ou une école d’art.
    Ensuite il y a la création. On peut très légitimement se dire que le public est assez grand pour savoir ce pour quoi il désire payer en matière artistique.
    Mais dans le contexte actuel, saturé par l’art de masse (américain en l’occurrence mais il pourrait bien être français), il n’est pas forcément inutile de placer quelques billes dans une vision des choses un peu différentes. L’art de masse et l’art « élitiste » ont toujours coexisté mais les médias actuels font pencher la balance économico-artistique du cà´té du vulgaire (au sens premier, pas au sens « grossier ») et de l’immédiat. L’état peut alors se donner (c’est le choix politique quoi) pour mission de contrebalancer, de financer une joueuse de viole de gambe pour laisser au public un choix qu’Universal n’a aucune envie de lui offrir. La question est très délicate : jusqu’o๠cette ingérence est-elle légitime ? Ne crée-t-elle pas parfois une concurrence déloyale ? (dans le cas des théà¢tres notamment). Chacun a ses réponses.
    Dans l’aide à  la création, comme dans le sport, il y a aussi un volet plus géopolitique. Accueillir à  Paris un « institut du monde arabe » (dans lequel le ministère de la culture est moins impliqué que celui des affaires étrangères, mais on comprend l’idée) n’est pas innocent au moment o๠le monde islamique doit se rappeler que sa civilisation diverse et variée est plutà´t détruite qu’autre chose lorsque des Tallibans dynamitent des statues en Afghanistan. Bien plus malhabile je pense (pas encore visité, je me fie pour l’instant à  ce que j’entends), le musée de l’immigration sert ce même genre de but, il envoie un message – enfin là  je reviens au patrimoine.
    L’aide à  la création sert aussi à  asseoir une relative indépendance nationale.
    Les libéraux passionnés comme vous semblez l’être pêchent souvent par une petite méconnaissance de l’histoire et de l’état exact du monde, vous n’en voyez que la surface. Par exemple, si vous connaissiez l’histoire de l’industrie américaine, y compris culturelle, vous constateriez que l’ingérence de l’état y est extrême. L’invention de l’ordinateur en est un excellent exemple (IBM et quelques autres ont vu leur recherches financées par l’armée, au profit de tous), de même que le « vol » de la notion d’art moderne qui est passé autour de la seconde guerre mondiale de Paris à  New York avec l’aide des services secrets américains : c’est complètement fou quelque part.
    Je ne suis pas obnubilé par les à‰tats-Unis, mais le fait est qu’ils dominent de nombreux secteurs, sans la moindre légitimité du reste, et que cela est du à  une politique très consciente, mais plus discrète et déguisée en libéralisme. Si l’état français ne cherchait pas à  résister partiellement à  cette domination, à  quoi servirait-il ?
    Libre à  vous de vous vouloir esclave et de manger des popcorns devant Die Hard 4. Pour ma part, je suis content qu’une alternative subsiste.

  37. Avatar de Etienne

    @Grouik :
    les deux modèles peuvent cohabiter ;) la preuve, ils le font !

  38. Avatar de manuel

    L’Inde est pauvre, pleine de gens miséreux, alors dis moi en quoi des familles multimillionnaires confrontées à  des problèmes existentiels tels que se marier ou non avec la famille voisine un peu moins riche est représentatif de la société indienne.
    La culture n’est pas accessible aux pauvres, ils en ignorent même peut être l’existence.
    Les bases de la culture japonaise, c’est connaitre son histoire, en être fier ou en avoir honte selon l’époque. C’est comprendre le cheminement de la société vers son état actuel.
    C’est perpétuer les rites bouddhistes et Shinto, l’art de peindre les Kanji, le théatre, la danse…

  39. Avatar de Jean-no

    @Gruik : la France (encore) participe régulièrement à  l’existence des cinémas nationaux dont tu parles. Certains auteurs japonais, coréens, iraniens ou israéliens (j’ai des exemples de chaque) ne sont connus que dans ce pays ! Certains bons films américains ont même plus de spectateurs ici que dans leur pays ou ont vu leur carrière démarrer en France, tandis que nous évitons (merci les distributeurs) les pires films américains (trucs de surfeurs qui rotent, comédies religieuses, etc.). Ce n’est pas pour dire « cocorico », mais il y a là  un soft counter power parfois efficace. Personne ne va voir de films japonais au japon, personne ne va voir de films italiens en italie, ou quasiment. Le fait qu’il existe quelques bons films dans tel ou tel pays ne prouve pas que le pays échappe à  la domination américaine. Le pire exemple est la Grande-Bretagne, qui a un excellent cinéma depuis toujours et qui ne le sait pas.
    « Desperate Housewive » contre « plus belle la vie » : personnellement je prends « Desperate Housewives ». La question n’est pas tellement là , et d’ailleurs la production américaine n’est pas que surestimée, il y a aussi là  bas un professionnalisme admirable et des artistes de grand talent.
    Mais quand le pays « évite » qu’un film français ait du succès en le rendant interdit aux moins de 18 ans (comme Kirikou par exemple), il s’agit de guerre industrielle. Quand des réalisateurs étrangers (René Clair, Jean Renoir, Kassowitz, des chinois, des coréens, des indiens, etc.) se font attirer à  Hollywood pour y ruiner leur carrière artistique dans des productions pleines de contraintes, sans accrocs et sans idées… Il me semble qu’il s’agit toujours de guerre industrielle (tiens tes ennemis encore plus près).

  40. Avatar de manuel

    Au fait Grouik, j’ai oublié, mais Kurosawa a influencé les sept mercenaires, pas le contraire…
    D’ailleurs les cinéma américain est un éternel copieur des cinémas étrangers.

  41. Avatar de Jean-no

    J’ai toujours été un peu étonné de lire des soi-disant libéraux réclamer la domination des américains ou trouver idiot de chercher à  y échapper : comme tous les primates, ils se cherchent des chefs, ils veulent juste que leur chef soit le plus fort.
    Pour moi l’indépendance culturelle est une question de survie : on ne peut pas vivre dans l’imaginaire et dans les rêves des autres, il est très bien de les connaître et des l’apprécier, mais il faut aussi développer sa propre culture.
    À propos je viens d’écrire un article qui parle des modèles de société et de leur rapport à  la culture : La peur ou la liberté

  42. Avatar de Jean-no

    @manuel : les indiens vont au cinéma, en masse, et ils se divertissent devant des films souvent niais mais avec des chansons et des danses incroyables (Ahhh… les voix de Mohamed Rafi, d’Asha Boshle et Lata Mangeshkar…). C’est un vrai cinéma populaire de distraction avec ses chefs d’oeuvre et ses blockbusters (Lagaan, Devdas). La mondialisation des goà»ts fait quelques ravages dans le domaine, les physionomies des acteurs (comme la très belle Aishwarya Rai) sont de plus en plus « internationales »… Dommage dans un sens.
    En revanche les indiens sont peu nombreux à  aller voir leur cinéma cinéphilique, par exemple les films de Satyiajit Ray, le Jean Renoir indien.

  43. Avatar de Jean-no

    @Gruik : Devdas est un cas passionnant car chaque adaptation est différente et par le décalage on peut voir les changements de l’approche du cinéma par les indiens.
    Quelle est la gravité qu’il y a à  être submergé par les oeuvres d’un seul pays ? Facile, il y a d’abord un volet économique (tout l’argent du spectateur part vers les US) et un volet idéologique. Quand U-574 attribue un fait de guerre britannique à  des américains, tu crois que c’est innocent ? Quand la plupart des films d’action justifient le fascisme individuel (faire justice soi-même, etc) ou l’obsession du terrorisme, tu crois que c’est innocent ? Il y a quelques années un épisode de la série « 24 » a été projetée devant une cour de justice américaine qui se penchait sur le cas de la torture. L’avocat avait coupé l’épisode en plein milieu en demandant : « pensez vous que Jack Bauer doive vraiment respecter la convention de Genève ici ? ». Il n’y a pas que des questions de standing là -dedans.
    Tu parles de MyMajorCompany : super, comme initiative, ainsi que tout ce qui permet à  la culture de se prendre en charge. D’ailleurs du siècle de Louis XIV on a mieux retenu ceux qui vivaient loin (Poussin, Lorrain, Le Nain, de La Tour, Vouet) que les courtisans (Le Brun, de Champaigne). Mais ça ne signifie pas que l’état soit inutile en matière de création : il peut aider, il peut aussi asphyxier, tout est question de dosage.
    À propos des bases culturelles de la France, tu te trompes un peu. Il y a soixante-dix ans, la culture française c’était l’école du réalisme poétique, par Prévert, Carné, Renoir, Clair, Feyder, c’est à  dire la seule grande époque du cinéma français (et celle qui a le plus influencé le reste du monde) avec la Nouvelle Vague.
    @Manuel : ”Plus belle la vie », c’est de la culture?…On est mal là ! -> en fait ça dépend de l’acception du mot culture. Le ministère de la culture se penche précisément sur la culture « cultivée », ou la culture « haute » ou la culture « élitiste » (les mots diffèrent selon le point de vue de celui qui les dit), parce que c’est celle qui est finalement la plus fragile et qui n’existe pas sans « prince » : pas de Michel Ange sans Lorenzo, pas de Phidias sans Péricles, Pas d’Appelle sans Alexandre, etc. Cependant, par diverses aides « automatique » à  la création, le ministère de la culture finance non pas « plus belle la vie » mais au moins « les bronzés 3 ».

  44. Avatar de Gruik
    Gruik

    L’Inde est pauvre, pleine de gens miséreux, alors dis moi en quoi des familles multimillionnaires confrontées à  des problèmes existentiels tels que se marier ou non avec la famille voisine un peu moins riche est représentatif de la société indienne.
    @Manuel : intéressante, ta théorie qui voudrait que les pauvres ne soient pas sensibles aux histoires d’amour des fils à  papa… Donc, si on poursuit ton raisonnement, la belle au Bois dormant ne s’adresse qu’aux notables qui ont du sang bleu, et les paysans n’aiment que les histoires de paysans ? Les ravages de la légende de la lutte des classes sont plus graves que je pensais…
    Quant à  Kurosawa : il a certes inspiré Les 7 Mercenaires, mais il est notoirement connu qu’à  l’origine, c’est un fan absolu de l’à¢ge d’or hollywoodien qui a grandement aidé à  son succès (on lui a d’ailleurs suffisamment reproché).
    @Jean-no : la France produit 230 films par an. As-tu des stats permettant de savoir combien dépassent 50 000 spectateurs ? Et combien s’exportent en dehors de nos frontières ? M’est avis que ces chiffres sont ridicules et que, mis à  part quelques grosses productions, la plupart des films français n’existant que grà¢ce à  des perfusions étatiques ne sont vus que par des parisiens élitistes qui profitent du détournement de l’argent des impà´ts de leurs concitoyens pour assouvir leurs petits plaisirs personnels.

  45. Avatar de Jean-no

    @Gruik : Kurosawa a plus inspiré le cinéma hollywoodien que le contraire même si son goà»t pour le western et pour John Ford est notoire. Comme tous les grands créateurs il a donné plus qu’il n’a reçu. Quand il n’y a plus eu personne pour voir ses films au Japon, il s’est fait produire par Coppolla, Lucas et Spielberg, qui lui ont ainsi repayé leur dette (Ran, Rêves) et peut être celle de Hollywood tout entier.
    Sur les films dont tu dis qu’ils ne pourraient pas exister sans l’aide de l’état, oui, c’est justement ce qui justifie l’aide de l’état. Les terme tels que « détournement de l’argent des impà´ts » ou « petits plaisirs personnels » ne me semblent pas justifiables, ils réveillent bien entendu le crevard franchouillard qui est en chacun de nous (ma cassette… ma cassette…) mais soyons sérieux une seconde : est-ce qu’un film n’a pas le droit d’exister s’il ne fait que 50 000 entrées ? Cela reviendrait à  dire qu’il ne faut produire que des oeuvres dont on est sà»r qu’elles obtiendront leurs deux millions de tickets. Est-ce que tous les cinémas ont automatiquement vocation à  accueillir le plus large public ? Est-ce que « La règle du jeu » de Renoir est moins intéressant que « Les bronzés 3 » ? Je pense que ça se discute, mais un coup de pouce de l’état permet à  un autre cinéma d’exister dans une relative indépendance artistique. J’ignore si le système est parfait (je suis certain que non du reste) mais son utilité me semble possible à  démontrer. Ensuite c’est une question de priorités.

  46. Avatar de Gruik
    Gruik

    « Est-ce qu’un film n’a pas le droit d’exister s’il ne fait que 50 000 entrées ? »
    Excuse-moi, mais ça n’est pas la question. Un film a le droit d’exister même s’il fait 1 000 entrées, et même s’il sort directement en DVD.
    L’essentiel, c’est que :
    1) Il soit rentable pour ses producteurs (un petit budget peut être parfaitement rentabilisé sans grosse audience). Note qu’un film peut aussi être rentable même s’il perd de l’argent, si les producteurs estiment que son existence a une valeur supérieure à  l’argent perdu.
    2) Il soit payé par les gens qui le regarderont, et pas par ceux que ça n’intéresse pas.

  47. Avatar de Criticus

    @ Lomig
    « Qui te dit que celà  n’aurait pas pu être fait par un (des) acteur privé (mécénat). »
    Personne, mais rien ne me dit non plus que le Vieux Lyon, deuxième plus grand quartier Renaissance après Venise, aujourd’hui source de recettes touristiques (il faut penser au long terme, ce qui n’est pas affaire de système économique, étatiste ou libéral), n’aurait pas été (partiellement) rasé. Et donc, je me réjouis que le politique, en la personne d’un grand ministre de la Culture parce que grand écrivain, ait pris la décision de s’opposer à  ce projet. Projet qui avait été décidé par les édiles municipaux et des entreprises…
    Par ailleurs, autre (contre-)exemple historique pour comprendre que le « mécénat » n’est pas suffisant : pendant la Révolution, à  la suite de la nationalisation des biens du clergé, l’église abbatiale de Cluny a été vendue par l’à‰tat (hyperendetté) à  un entrepreneur privé, qui l’a transformée en carrière de pierres… Cela aurait valu un sauvetage, tu ne penses pas… ?

  48. Avatar de Gruik
    Gruik

    Une « indépendance artistique » qui s’appuie sur le vol de ses concitoyens, ça choque le semblant d’éthique qui me guide dans la vie, que veux-tu.
    La vraie indépendance artistique, pour moi, c’est celle qui consiste à  convaincre les producteurs et les spectateurs que ce qu’on a à  offrir au monde en vaut le coup.

  49. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    si bien sà»r !
    mais je ne suis pas sà»r que la réflexion puisse se contenter de prendre des cas particuliers pour défendre tel ou tel point de vue. Je le fais aussi, je le confesse bien volontiers…!
    On peut trouver de nombreux cas aussi o๠les propriétaires (co-propriétaires) ont fait de leurs quartiers des lieux encore magnifiques aujourd’hui.
    La question, en l’occurence, c’est que la défense du patrimoine est quelque chose de différent du fait de mettre des billes dans des oeuvres / programmes artistiques pour faire émerger de nouvelles oeuvres.
    Dans un cas, on préserve ce qui existe (cela ne me choque pas, et encore cela dépend comment la dépense est répartie) ; dans l’autre on fait croire qu’il faut une organisation centralisée et étatisée pour que l’industrie artistique tourne comme il faut. Arbitraire, coà»teux, et contre-productif.
    à  bientà´t !

  50. Avatar de Jean-no

    @LOmiG : Sur le coà»teux, le prix de la culture dépend de chacun, n’en parlons plus. Sur l’arbitraire, ma foi, l’art n’a jamais été autre chose que de l’arbitraire. L’art démocratique, c’est la Star Academy, mais pour un art plus élevé, il faut des gens qui y croient : secteur public ou privé, peu importe, il faut justement des gens qui croient que l’existence d’une oeuvre est plus importante que l’assurance d’un retour sur investissement immédiat.
    C’est sur le « contre-productif » qu’il me semble possible de discuter. Si on compare la France à  un pays proche mais culturellement sinistré comme l’Italie, on constate qu’une politique culturelle tournée en partie vers la création n’est pas sans effet. Cependant, certains pays comme la Grande-Bretagne se passent presque totalement du secteur public et tiennent le haut du pavé : des artistes comme Damien Hirst ou Lucian Freud sont des stars internationales de l’art contemporain. Le fait d’être anglophones sous la domination culturelle américaine aide sans doute mais n’explique pas tout. Je doute tout de même que si l’état n’aidait plus l’art en France nous aurions subitement des collectionneurs-spéculateurs venant en masse investir dans l’art actuel, car chez nous ces questions comptent un peu moins : l’art contemporain est moins utilisé comme « signe de reconnaissance » des classes sociales les plus fortunées, notamment du fait de la politique Malraux. Le système de l’art britannique brasse de l’argent (Hirst est deux fois plus riche que Mick Jagger) mais il repose sur des super-stars et des oeuvres tape-à -l’oeil. C’est autre chose.
    On pourrait aussi mentionner l’Allemagne, plus importante que la France en matière d’art et de culture, en grande partie grà¢ce à  l’argent public mais pas de manière centralisée, puisque c’est la concurrence entre les lander et entre les villes qui joue. Chacun tente d’attirer des artistes en fournissant des ateliers notamment. Un autre système donc.

  51. Avatar de Jean-no

    @Gruik : le genre « contribuable en colère » est toujours un peu navrant, un peu mesquin, c’est le genre français d’ailleurs. L’état n’est pas là  pour qu’on en ait pour son argent directement, il est là  pour construire une société. Il faut le surveiller, éviter le gà¢chis, c’est vrai, mais déclarer « oulalah je suis pas content, le film truc que personne n’est allé voir a profité d’une bourse d’état » c’est un peu idiot. Mais ça ne l’est pas moins que de serrer les dents en tendant les fesses aux américains et en disant « je suis libre ! je suis libre ! ».

  52. Avatar de Gruik
    Gruik

    >> »le genre ”contribuable en colère » est toujours un peu navrant, un peu mesquin, c’est le genre français d’ailleurs. »
    Non non, c’est la réaction naturelle de beaucoup de gens qui ne comprennent pas pourquoi on leur prend une partie de leurs revenus pour des raisons obscures et non transparentes. C’est la réaction de ceux qui aiment la liberté et n’acceptent pas la soumission.
    >> »L’état n’est pas là  pour qu’on en ait pour son argent directement, il est là  pour construire une société. »
    Toute la différence entre toi et moi. Pour moi, l’état n’est pas là  pour « construire une société », mais pour assurer les conditions nécessaires de sécurité et de stabilité afin que les citoyens construisent EUX-MEMES cette société.

  53. Avatar de Gruik
    Gruik

    @ tous :
    Si vous avez 5 minutes, regardez cette vidéo de Jeff Plante sur les subventions aux artistes au Québec :
    http://fr.youtube.com/watch?v=5tE2BcUK27s
    En réponse à  cette vidéo pour le moins discutable faite par les artistes pour se justifier de recevoir des aides :
    http://fr.youtube.com/watch?v=UrATQeLLKX0

  54. Avatar de Jean-no

    @Gruik : Sur le Québec, tu tombes dans un tout autre débat qui est celui du Québec contre le Canada. Ton Jeff Plante qui compare les artistes « qui ont la vie facile » aux gens « comme nous autre » est juste démago. Artiste n’est jamais un métier facile. L’idée de celui qui se la coule douce, qui se laisse aller en attendant ses subventions, est irréaliste, il n’y a pas d’artistes salariés par le ministère de la culture, il n’y a que des projets qui sont dotés d’une bourse ou des oeuvres qui sont achetées, on est sur du concret. Personnellement j’ai travaillé et je travaille encore avec trois des plus importants artistes français, eh bien franchement je ne connais personne qui travaille autant, du matin au soir.
    Pour le reste, une société se construit sur plusieurs piliers, dont l’état fait partie. Par ailleurs l’état c’est aussi le peuple, notamment en démocratie.L’état dont tu rêves est un libre-service, un self post-moderne sans but. Sécurité et stabilité : quelle vision d’esclave, bon dieu ! Et c’est toi qui parle de soumission et de liberté, quelque part c’est très ironique.

  55. Avatar de penthievre
    penthievre

    @jean-no,
    NON! L’Etat ce n’est pas aussi le peuple. L’Etat n’en est que l’expression commune du fonctionnement des institutions, et, en ce sens, n’est dépendant, dans son fonctionnement, que des règles constitutionnelles, donc totalement apolitique. On dit Etat impartial.
    C’est exactement ce que signifie l’Etat de droit, dont les seules objections ne peuvent venir que des juges.
    La démocratie (l’expression populaire des choix individuels) s’exprime pour déléguer le pouvoir législatif et de contrà´le à  des députés/sénateurs.
    Le pouvoir exécutif est borné (en principe) par l’exécution des lois.
    Dans une telle optique, l’Etat ne représente que la partie administrative du bon fonctionnement légal; et, selon moi, il devrait s’en tenir là !
    Il ne faut en aucun cas, confondre Etat et Pouvoir.
    J’avoue que cette position est totalement galvaudée depuis plus de 30 ans.

  56. Avatar de Jean-no

    L’impartialité a de nombreuses limites. Déjà  l’état nait d’une volonté politique, et puis il se perpétue par une volonté politique (fluctuante).
    Je ne peux que te recommander la lecture de « Comment pensent nos institutions » par Mary Douglas. En plus c’est en poche.
    Les principes c’est bien joli, mais il faut les confronter aux faits. L’état est un cadre pour l’exercice du pouvoir, mais il n’est pas neutre pour autant : sa partialité est juste plus lente que celle de l’exécutif, en général, et plus puissante aussi.

  57. Avatar de michel V
    michel V

    bonjour à  tous.
    « la culture, au sens large, est quelque chose de vivant, et qui bouge qui évolue. Un ministère de la culture ne peut à  mon sens que préserver ce qui existe déjà . Et s’il se mêle de faire émerger des choses, je ne vois pas comment il pourrait être plus efficace que le public et le marché pour cela. »
    Entièrement d’ accord avec toi lOmig car comme l’ affirme le dicton » c’ est à  ses fruits que l’ on reconnaît un arbre ».Or, il est patent que les fruits sont du cà´té des démocraties libérales, en qualité et en quantité dans le domaine des arts (littérature, cinéma et musique populaire).
    En effet, le libéralisme politique et le libéralisme politique sont les conditions nécessaires au développement optimal des arts.
    L’ histoire du cinéma et de la musique populaire au XXe siècle illustre le primat de l’ initiative privée. Dès qu’ un régime autoritaire ou collectiviste s’ implante dans un pays , la culture recule.
    L’ absence de liberté politique est préjudiciable à  l’ éclosion et l’ épanouissement des talents comme le montre l’émigration des cinéastes allemands ( Fritz Lang, Mankievich, Lubitch,,…) sous l’ Allemagne nazie.
    Le défaut d’un environnement économique libéral est le deuxième puissant frein à  l’ éclosion et l’ épanouissement des artistes et des mouvements artistiques. A l’ Est, on comptait( sur les doigts d’ une main ) les grands cinéastes : Eisenstein,Bondartjouk et tarkovski ;A l’ ouest étaient les john Ford, Huston, Hitchkock ,…plus d’ une centaine de grands réalisateurs ayant réalisé leurs films grà¢ce au système capitaliste.
    Je termine en faisant observer que les Polansky, Mikalkov, milos Forman,…ont rejoint l’ ouest pour bénéficier des bienfaits de l’ économie libérale pour réaliser leurs projets.Bien cordialement.

  58. Avatar de Jean-no

    Attention aux raccourcis historiques : Mankiewicz n’était pas allemand mais américain, il a travaillé un ou deux ans en Allemagne et a quitté le pays avant la prise du pouvoir par les nazis pour une sombre histoire d’argent. Lubitsch et Lang quand à  eux étaient juifs ce qui explique leurs distances avec le régime ! Lubitsch a commencé sa carrière américaine avant 1933, il n’est juste pas revenu… Quand à  Lang, Goebels l’a embauché pour la propagande, je crois que Lang a signé avant de prendre le premier avion pour n’importe o๠– pour la France peut-être bien. Son épouse (scénariste de Mabuse ou de Metropolis), militante au parti nazi, a fait une carrière importante à  l’UFA.
    Le parti nazi est intéressant dans l’histoire entre art et pouvoir car Mein Kampf commence par un récit de jeunesse de Hitler qui explique comment il a bravé son père qui refusait qu’il devienne artiste… De fait, le parti nazi a énormément instrumentalisé l’art, et notamment le cinéma, avec des oeuvres d’avant-garde formelle (Leni Riefenstahl) et d’autres nettement plus « démocratiques » (et minables). On aimerait imaginer qu’il n’y a pas un gramme de talent chez Arno Breker, Albert Speer etc., mais ça n’est pas si simple. De même en Italie ou le parti fasciste a utilisé d’Annunzio ou le cinéma encore et toujours, pour servir sa propagande, avec parfois des réussites artistiques.
    Si l’art s’épanouissait dans la démocratie et la liberté, ça se saurait : en fait c’est l’individu qui s’y épanouit, mais pour faire des Versailles, des Florence, des Rome, il a fallu un pouvoir autoritaire, mais un pouvoir autoritaire qui plaçait l’artiste au dessus du commun des mortels. Par exemple quand Michel Ange a manqué de tuer le pape qui tentait de venir voir son boulot sur la chapelle sixtine, c’est le pape qui s’est excusé. On peut lire l’histoire du rapport entre pouvoir et art dans « Contre l’art et les artistes » de Jean Gimpel.
    Pour l’art soviétique, renseignez-vous : il a été très riche, et pas qu’à  Moscou d’ailleurs puisque chaque république avait son studio. En revanche il y a eu un gà¢chis humain abominable, des génies ont été mis en prison, sortis de prison, remis en prison, cassés, brisés, notamment les idéalistes, et la guerre a liquidé presque tous les studios du pays. La situation a été comparable en peinture, en littérature ou en musique.
    Bref, je ne crois pas qu’il existe véritablement un régime favorable aux arts, les plus odieux ont parfois eu des résultats… Et parfois pas du tout. Les choses se passent au cas par cas et l’art n’est pas intrinsèquement porteur de valeurs démocratiques – ni despotiques.

  59. Avatar de alan de Bx

    Ce post est très intéressant, enfin les commentaires de chacuns, voire de tous sans exception sont très stimulants, très riche malgré les différences. Je laisse mon approche politique et libérale de cà´té pour prendre ce thème par la philosophie. Pourquoi un ministère de la culture? Cela ne voudrait-il pas dire que la notion même de culture, engagerait-elle pas une réflexion sur l’éducation? Kant stipulait à  l’époque « la culture est ce qui permet aux hommes de sortir de leur minorité » cad de développer ce dont la nature les a dotés, soit leur raison.
    Auparavant la culture avait été en quelque sorte opposée à  la science et à  la technique, comme si d’ailleurs les oeuvres qui relèvent de ces disciplines devaient pouvoir être jugées à  part et bannies de ce qu’une personne(citoyenne) devait savoir pour apprendre à  juger seul. De nos jours, peut-être grà¢ce à  la création d’un « ministère » cet enjeux contemporain de la culture nous conduit, enfin tient, dans cette réconciliation entre humanitéset sciences. Cependant beaucoup de questions restent en suspend. Par exemple la culture(dans certain ministère…pays) dite de masse, est-elle encore culture? Tous les processus d’acquisition et de mise en culture des savoirs, sont-ils également recevables au titre d’une politique culturelle?
    En fin de compte, force est de constater que les modèles qui nous servent à  définir une culture, ils sont très souvent partie prenante d’un passé que l’on ne veut surtout pas révolu.
    Soit le propre d’une culture, c’est d’être connue comme telle dans l’après-coup, lorsqu’une civilisation a passé et a figé ses formes les plus ….saillantes.
    Ne sommes-nous pas quelque peu conservateur? La culture a-t-elle besoin d’un ministère? ou est-ce le Ministère qui a besoin de la culture?
    Culture: habiter;cultiver;vénérer (cultura, de colere)
    Niveau politique libérale, voici ce dont nous proposons, cliquez sur le lien qui suit, merci:http://www.alternative-liberale.fr/pr157-Culture.html
    Bien librement
    AL’ain G

  60. Avatar de Jean-no

    @Alain : je suis allé voir la page, vous partez dans tous les sens :-) Par exemple l’AFP, à  quoi ça sert ? Comme toutes les agences nationales de presse, ça sert à  donner une voix officielle à  un pays ainsi qu’une source d’information semi-impartiale… Je ne sais pas si c’est bien ou pas, mais on est très loin des questions de culture, il s’agit véritablement de politique et de diplomatie.
    Les intermittents : difficile question. Dans le cas des gens qui bossent dans le cinéma, le système est très logique, car la manière dont les choses s’enchainent impose de courtes périodes de chà´mage de manière régulière (on change d’employeur tout le temps) et par ailleurs ce statut permet de cotiser aux différentes caisses de manière bien plus transparente et régulière que le statut d’indépendant. En revanche quand ça devient du CDI déguisé, comme dans certaines chaines de télé, il s’agit clairement d’un dévoiement du système.
    Le monopole du syndicat du livre et des messageries nationales n’existe pas : Le Parisien / Aujourd’hui en France se vend par exemple dans les boulangeries et est imprimé par l’éditeur. Cependant aucun autre n’a eu le courage d’en faire autant en dehors des gratuits qui eux aussi échappent au système.
    Les TV nationales : difficile d’imaginer qu’un grand pays n’ait aucune chaine de tv nationale ou juste une petite chaine culturelle. Mais ça se défend bien sà»r : en quoi un talk show ou un jeu relèvent-ils du service public ?
    La cession des droits patrimoniaux… Argh… Vous avez-vu le résultat aux US ? Un film peut faire 200 millions de dollars de recettes tandis que l’inventeur du personnage agonise dans une maison de retraite à  200 euros le mois… N’est-ce pas un type de situation cruelle et injuste, qui laisse les coudées franches aux gros capitaux pour devenir les ayant-droits d’oeuvres extorquées à  des artistes dans le besoin ?
    Il y a en revanche une réflexion à  faire sur le pouvoir des ayant-droits : est-ce qu’il est normal que le neveu bloque la parution du journal du tonton ? Pour moi il faut d’abord penser à  l’intérêt du créateur, de l’oeuvre et enfin du public et, en dernier lieu, à  l’industrie culturelle.
    Sur la Sacem : le problème est son opacité. Si demain j’organise mon mariage uniquement à  base de musique classique, la Sacem me demandera un forfait de quelques dizaines d’euros destiné à  atterrir dans les poches de Johnny Halliday. C’est illégal (ils y vont au bluff, car il n’y a pas perception d’un droit d’entrée, un mariage est privé) et illogique (je n’aime pas trop Johnny). De plus leurs pratiques freinent énormément de projets, notamment pour les petites villes qui veulent organiser des concerts de cent ou deux cent personnes : les barèmes empêchent ce genre d’évènement d’être rentables.
    Loi sur le panorama : ça va avec le droit d’auteur (si le bà¢timent existe depuis moins de 70 ans après la mort de l’architecte…), néanmoins je ne trouve pas que ce soit très bien, car une telle loi entre en contravention avec le droit à  créer et avec le droit à  informer.
    Sur le téléchargement : beaucoup d’hypocrisie en effet, les maisons de disques n’ont pas peur des pirates, mais bien du téléchargement commercial légal qui, à  terme, peut les rendre inutiles.

  61. Avatar de BLOmiG
    BLOmiG

    salut à  tous,
    et merci pour vos échanges enflammés, mais respectueux des autres. C’est ce que je recherche sur ce blog.
    @ Jean-no : tu dis

    L’art démocratique, c’est la Star Academy, mais pour un art plus élevé, il faut des gens qui y croient : secteur public ou privé, peu importe, il faut justement des gens qui croient que l’existence d’une oeuvre est plus importante que l’assurance d’un retour sur investissement immédiat.

    je suis entièrement d’accord avec cela. Mais pas sur le fait de dire « public » ou « privé », peu importe. Ce n’est pas ça qui compte. Ce qui compte c’est de savoir si on utilise la contrainte pour forcer les citoyens à  financer des choses qui ne les intéresse pas. Laissons ceux qui croient dans un artiste ou dans son oeuvre lui donner les moyens de se produire, de faire connaitre son travail.
    Pour revenir sur des points abordé par Alain, et Grouik, et Michel V : la culture au sens large (incluant à  la fois la star ac et Boulez, les CH’tis comme les films de Godard, mais aussi tout ce qu’on peut lire et entendre) est quelque chose de mouvant dont l’évolution n’est pas complètement prévisible. Les processus d’évolution qui ont cours en son sein ne peuvent être contrà´lés par l’esprit humain. C’est le constructivisme qui pense le contraire, et qui affirme que chaque évènement a été décidé par quelqu’un (individu, gouvernement, ou autres).
    Je pense donc qu’il est fondamentalement illusoire de croire qu’un ministre de la culture (aussi visionnaire soit-il, et aussi compétent soit-il) peut anticiper les évolutions de cette culture, et choisir quel ou quel artiste doit recevoir des fonds pour son travail génial. la génération de diversité (la création), puis de sélection parmi cette diversité se fait le plus justement possible par des processus de type marché, incluant le business, mais aussi la critique, les modes, les interactions non-prévues avec le reste de la société, etc…
    Ayons l’humilité de reconnaitre que la « culture » prise en ce sens, est principalement le fruit d’un processus d’évolution, et non d’un processus volontaire et conscient de « construction ».
    à  bientà´t !

  62. Avatar de Jean-no

    @LOmiG : quand Louis XIV, à  la suite de Fouquet, a construit l’art de son temps, il l’a fait sur le dos du contribuable, qui a d’ailleurs été lourdement mis à  contribution, selon un modèle que certains voudraient voir revenir, à  savoir l’impà´t inversement proportionnel (plus on est pauvre et plus on paie). C’était injuste et cruel, mais du point de vue artistique, ça a donné un patrimoine extrêmement marquant pour le pays, notre « grand siècle » comme on dit : Vaux-le-Vicomte, Versailles, Le Nà´tre, Le Vau, Le Brun, Molière, Racine, Corneille, La Fontaine, Lully, l’Académie française, l’à‰cole des Beaux-Arts, la Comédie Française…
    Je ne défends pas, mais je constate que tout cela s’est fait avec l’argent public (enfin semi-public car Louis XIV ou Fouquet mélangeaient un peu comptes personnels et comptes publics).
    Je vous rejoins cependant sans problème sur le fait que le ministre de la culture n’est pas un visionnaire, qu’une « avant-garde » d’état est une idée absurde. Tout le monde est d’accord, mais ça ne signifie pas pour autant qu’un refus d’aider la création, d’acquérir des oeuvres ou de soigner celles qui existent soit plus avisé. Les bourses d’aide à  la création doivent représenter au total quelques centaines de milliers d’euros par an, moins cher qu’un ou deux kilomètres d’autoroutes. Ce coup de pouce très ponctuel (je connais quelques artistes qui ont touché une fois dans leur vie 7 000 euros…) n’est qu’un coup de pouce mais il peut être utile notamment dans l’art technologique qui a des coà»ts de production important. Je doute que le rapport qualité/prix soit vraiment mauvais.
    Sur l’évolution et la construction, eh bien l’exemple du mécénat d’état (depuis les grecs) montre que les deux paramètres ont toujours coexisté.
    Ce qui est très nouveau c’est que l’état n’ose pas beaucoup dicter ses oeuvres aux artistes, on est loin de l’époque o๠les moines de San Giorgio Maggiore commandaient à  Véronèse un tableau en lui disant quelles couleurs ils voulaient qu’il utilise. Il en sort de belles choses, et sans doute de moches ou d’insipides. Pas très grave.

  63. Avatar de Gruik
    Gruik

    C’est vrai, Jean-no, les régimes tyranniques, quoi qu’on en dise, ont aussi des bons cà´tés !
    Aurait-on construit la Grande Muraille de Chine sans l’Empereur Qin, fusse au prix d’1 million de vies d’ouvriers-esclaves ? La seule construction humaine visible depuis la lune, ça valait le coup, quand même, hein ? Et puis, pourrait-on rouler aujourd’hui sur les belles autoroutes allemandes au volant de Volkswagen et de Porsche sans Hitler ?
    Hé, quand on y pense…

  64. Avatar de Jean-no

    @Gruik: tout ce que je dis, c’est que l’art n’est pas automatiquement lié à  la démocratie ou aux droits de l’homme contrairement à  ce qu’affirmait Michel V. Ni lié, ni antinomique d’ailleurs. La condition sine qua non à  l’existence d’une création artistique c’est le fait qu’il y ait une demande, qu’elle émane de l’état ou du secteur privé.

  65. Avatar de michel V
    michel V

    @ Jean-no :« L’art démocratique, c’est la Star Academy. ».Non, désolé, mais « cette dernière » relève plutà´t du mécènat d’ ordre privé (TF1 et son jury… ) c’ est à  dire in fine d’ un certain contructivisme.
    En matière de musique populaire , nul besion de constructivisme. Chaque chanteur ou groupe constitue « une petite entreprise » en soi (« ma petite entreprise » chante si justement Bashung) relevant du seul projet d’ un individu ( Brel, Ferré, Elvis presley, Sinatra, Bob Dylan…) ou groupe d’ individus ( The Beatles, the Rolling Stones, Pink Floyd,…).
    « La condition sine qua non à  l’existence d’une création artistique c’est le fait qu’il y ait une demande, qu’elle émane de l’état ou du secteur privé ».Je ne suis pas d’ accord avec cette affirmation non plus. Me situant dans le droit fil de David Ricardo j’ estime que c’ est l’ offre qui crée la demande en tout dernier ressort, pas le contraire.
    Il n’ y a pas eu d’ abord un besion de rock suscité par une demande quelconque de l’ Etat ou du public. Ce sont des musiciens pour qui la musique est un but en soit et qui ont de façon séparée ou groupée proposer au public leur production musicale . Bob Dylan aurait de toute façon chanté toute son existence ( il continue d’ ailleurs à  travers une » Never ending tour ». C’ est bien l’ artiste qui en offrant ses compositions ou musiques crée la demande musicale pas l’ inverse. Le public suit ou ne suit pas. En 1966 Bob Dylan a imposé, avec succès, un nouvelle offre musicale en électrifiant sa guitare au grand dam d’ une grande partie de son public qui réclamait qu’ il continuasse dans la veine folk .

  66. Avatar de alan de Bx

    Voyez ce qui se passe au Canada. Faute de temps je reviendrais cette nuit sur « la culture », sa critique.
    voici un lien provenant de QL et rédigé par son directeur M.Guénette.
    http://www.quebecoislibre.org/08/080915-5.htm

  67. Avatar de Jean-no

    @Michel V. : Le mécénat de TF1, c’est assez neuf pour moi comme notion. Les gens regardent TF1 de leur plein gré et envoient des SMS surfacturés pour choisir leurs candidats de leur plein gré. Même si cette demande populaire est le produit d’une éducation (d’un dressage même), elle n’en est pas moins une demande populaire financée indirectement par les auteurs de la demande.
    Sur l’ordre de préséance entre l’offre et la demande, la question est moins facile à  trancher que tu ne le dis. Une attente peut exister sans être nécessairement formulée ou consciente. Lire Umberto Eco sur l’invention du Rugby par ex.
    Le cas du Rock est très intéressant, car ce n’est pas un genre musical très définissable finalement (contrairement au Rag indien, au Bebop ou au Ska par ex.), et pourtant ça existe… Et ça existe parce que les baby boomers ont eu besoin à  un moment donné de se projeter dans quelque chose de neuf, qui ne soit pas seulement une musique, mais aussi une « attitude ». L’industrie a sagement organisé la chose sachant que toute attente culturelle (provoquée ou latente) peut être comblée par des choses à  vendre (disques, pantalons, blousons, véhicules, etc.).

  68. Avatar de michel V
    michel V

    @ Manuel : merci d’ avoir rappeler l’ influence de Kurosawa sur le western hollywoodien. Je ne résiste pas au plaisir de signaler que le film de Sergio Leone « pour une poignée de dollars » est inspiré du film « le garde du corps » du cinéaste japonais.
    @ Jean-no :Je salue tout d’ abord ta culture cinématographique, vraiment. Toutefois, je persiste et signe en ce qui concerne ma position quant à  la supériorité, à  l’ époque moderne, du libéralisme sur le dirigisme étatique en tant que régime favorable au développement de la culture et des arts. C’ est le seul régime que n’ entrave pas les efforts des « têtes qui dépassent «.
    J’aurais aimé que tu m’indiques des noms de cinéastes soviétiques ou de films soviétiques de la hauteur des Wells,Bergman, Fellini, Visconti, Losey,….qui ont oeuvré en économie libérale à  la même époque. Pour ma part je ne vois que les films suivants : Ivan le terrible, Quand passent les cigognes, Guerre et paix et les amours d’ une blonde.
    Enfin j’ observe que le socialisme cubain a réussi le tour de force de faire taire pendant 50 ans des musiciens et chanteurs tel que Compay Secundo,…revenu à  la musique grà¢ce à  l’ entremise du cinéaste Wim Winder et de son film « Buena vista social club » .

  69. Avatar de Jean-no

    @Michel V. : Parmi les soviets intéressants on peut mentionner Ekk, avec un film extraordinaire sur les enfants perdus, « Le Chemin de la vie », Tarkowski quand même, les frères Vassiliev, et pour finir Gari Bardine,… Par ailleurs, que l’on aime ou pas, tout le cinéma avant-gardiste soviétique me semble très intéressant, notament Dziga Vertov, Protazanov (qui a réalisé un des premiers films de SF de l’histoire, Aelita), Poudovkine, Alexandrov, Guerasimov, Koritzev, Trauberg, et puis Eiseinstein évidemment. Je ne connais pas les films de tous ces gens là , disons que j’ai du voir une quinzaine de films soviétiques, mais ils sont tous dans les histoires du cinéma. Un film que j’aimerais beaucoup voir s’intitule « un jour en URSS » : filmé pendant une journée par des centaines d’opérateurs, il montre l’empire soviétique du lever du soleil sur la Sibérie à  son coucher sur la Baltique.
    Un cas particulièrement étrange est celui de Joris Ivens, le néerlandais qui a travaillé pour l’URSS ou la Chine populaire, dans une indépendance extraordinaire. Cela n’a pas été le cas des autres, c’est évident. Ceux qui suivaient Lénine (« le cinéma est parmi tous les arts le plus important ») ont suivi les errances de la révolution : modernité et avant-garde, enthousiasme, dogmatisme, puis propagande, contrainte, procès, internements,…
    Mais voilà  le problème : je ne crois pas du tout qu’on puisse comparer l’aide étatique à  l’art dans une dictature sanglante et dans une démocratie pépère. Cependant les deux régimes ont connu leurs succès artistiques, parfois grà¢ce à  l’étatisme, parfois contre… On peut à  la rigueur dire « tel système respecte mieux l’humain », mais pas « tel système respecte mieux l’art », et encore moins oser des réflexions déterministes telles que « l’art ne peut pas éclore dans telles conditons », car on se heurte alors à  des contre-exemples en pagaille.
    Quand au libéralisme sans cadre, il peut lui aussi faire taire l’art. Que pensez-vous du cas de Disney qui, pour que ses films de grande qualité soient seuls n’a pas hésité à  acheter des films d’animation hongrois pour les détruire et à  faire chanter les networks américains en leur imposant de ne diffuser aucun dessin animé de Tezuka (le roi Leo, qui a d’ailleurs inspiré le roi lion ensuite, a eu un grand succès aux us au milieu des sixties et Disney s’est senti, à  juste titre, menacé).
    Personnellement, je suis loin d’être suspect de soutenir les républiques socialistes passées ou présentes, mais entre ces dictatures et le fait d’avoir un ministère de la culture, je ne vois pas bien le rapport.
    Au fait, on parle de Kurosawa… Un de ses plus beaux films, Dersou Ouzala, est bien un film soviétique !

  70. Avatar de Fabrice

    @ Michel V
    Comme ça de mémoire je citerais l’oeuvre de Tarkovski (Solaris, Stalker), il paraîtrait même qu’hollywood a réussi le merveilleux prodige de faire un remake tout pourri de Solaris y’a pas longtemps, comme quoi… (enfin, tout pourri, que je considère tout pourri en tout cas)
    En fait les plus grandes périodes de création artistique du 20e siècle ont lieu en réponse à  des tendances moralistes qu’on peut difficilement taxer de « libérales »; l’économie libérale, si elle permet l’explosion de la notoriété par voie de mass-media n’est pas responsable de l’engagement artistique, c’est toujours en réponse à  une oppression (sociale, intellectuelle, politique…) qu’éclot une grande période de création.
    Sinon, la société « libérale » américaine depuis Raegan a produit combien de chefs d’oeuvres impérissables ? Faut pas confondre succès et valeur artistique, Britney Spears (ou Madonna, ou Puff Dady, ou 50 cents…) est certainement plus connue que Mozart de nos jours, je n’irai quand même pas jusqu’à  considérer qu’elle lui soit supérieure….

  71. Avatar de manuel

    Je l’ai vu le Solaris pourri, je n’ai pas réussi à  aller au bout….

  72. Avatar de Fabrice

    @ Jean No
    pfffuit, et dire que je croyais m’y connaître un peu en cinéma, je retourne direct jouer aux billes là …..

  73. Avatar de Jean-no

    @Manuel : pareil. J’aime bien Clooney et Soderbergh, mais là , le sommeil m’a terrassé brutalement, je ne me suis quasiment jamais autant embêté devant un film. Le DVD est dans une pile de films à  finir de voir, mais je ne pense pas que j’y parviendrais.

  74. Avatar de Jean-no

    @Fabrice : il y a plusieurs réalisateurs ou films que je cite que je ne connais que de réputation. Cependant je connais un peu le cinéma, par goà»t et aussi par profession puisqu’une partie de mes activités est la recherche appliquée dans le domaine du cinéma interactif.

  75. Avatar de michel V
    michel V

    @Jean-no:un grand merci pour les films cités.Salutations cinéphiles.

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