La discrimination est-elle toujours négative ? Une simple vérification dans le dictionnaire permet de se rendre compte que non, et qu’il est même indispensable de bien distinguer la nécessaire non-discrimination aux yeux de la Loi, de la non-moins indispensable discrimination liée aux choix de vie faits par les individus, et qui sont du ressort de leur liberté. Pour ne pas voir l’arbitraire devenir autre chose qu’individuel : quand les gens ne sont plus égaux devant la Loi, c’est le début du totalitarisme.
Définitions
La discrimination est un gros mot dans le langage de la bien-pensance. Comme toujours, il est utile de comprendre pourquoi, et de voir s’il est raisonnable de se mettre confortablement dans la pensée facile. Le dictionnaire ne peut que nous aider dans cette tâche.
Discriminer :
Différencier, en vue d’un traitement séparé, (un élément des autres ou plusieurs éléments les uns des autres) en (le ou les) identifiant comme distinct(s).
et puis :
Discrimination :
- [Sans idée de traitement inégal] Action, fait de différencier en vue d’un traitement séparé (des éléments) les uns des autres en (les) identifiant comme distincts. Synon. distinction.
- [Avec une idée de traitement inégal]
- ÉCON. Pratique consistant à vendre le même produit, dans le même moment, à des prix différents selon divers critères (acheteur, lieu, usage, etc.).
- Souvent péj. Traitement différencié, inégalitaire, appliqué à des personnes sur la base de critères variables. Par ex. Discrimination raciale. Synon. ségrégation (raciale).
La discrimination, avant d’être l’épouvantail que l’on connait (qui se focalise sur le dernier sens, associé à la ségrégation raciale), est donc l’action de traiter différemment les choses en les distinguant. C’est une des actions de bases de l’intelligence humaine. Etre capable de saisir des rapports, identifier les différences, et en tenir compte dans ses actes. La vie de tous les jours, pour chacun d’entre nous, est synonyme de dicrimination : je choisis d’aller dans tel ou tel restaurant, je préfère fréquenter telle ou telle personne, etc. selon des critères qui me sont propres, et qui ne sont pas nécessairement les mêmes pour tout le monde. Vouloir supprimer toute discrimination, c’est vouloir faire taire l’intelligence, et la subjectivité des individus. La discrimination est donc indispensable, et utile.
Il y a pourtant un domaine où la discrimination n’est pas acceptable, c’est quand on touche à l’égalité de traitement des individus devant la Loi. La base d’une société libérale, fondée sur un état de droit, c’est justement cela : la non-discrimination des individus devant la Loi. Chacun, quelle que soit sa couleur, son sexe, sa religion, sa profession, etc… doit être traité de la même manière par la Loi. Sur ce point, et seulement sur ce point, combattre la discrimination est indispensable.
Pourquoi il faut discriminer
Il me parait important de rappeler ces deux sens de la discrimination, car l’ambiance actuelle pousse à ne pas discriminer (ou plutôt, à ne pas dire que l’on discrimine). Il faut être rigoureux là -dessus : chacun dans ses affaires privées, doit avoir le droit de discriminer comme il l’entend. La propriété privée, par exemple, donne droit à l’exclusion. Ce qui est à moi (ma maison, par exemple) me donne un droit d’exclusion : je reçois chez moi qui je veux, et j’en écarte qui je veux. Quand on force, par la loi, des établissements privés à accepter tout le monde, on commet à mon sens une erreur. Et c’est ce que la jurisprudence montre : Fanny Truchelut a été condamnée pour avoir exclu de chez elle deux femmes voilées. Il s’agit d’une atteinte à la propriété individuelle. Tout le monde doit être égal devant la Loi, c’est une chose. Mais la Loi ne dit pas à la place de Fanny Truchelut qui elle doit – ou non – accepter chez elle. Que l’on soit bien d’accord : celui qui décide de ne pas laisser entrer les noirs dans son restaurant, par exemple, est un sale raciste. Mais ce n’est pas en le forçant à les accepter qu’on le fera devenir moins raciste. On porte simplement atteinte à sa liberté individuelle de discriminer. Alors, oui, c’est sûr, personne n’ira moralement le défendre. Mais le jour où on nous forcera, pour une raison quelconque, à accepter chez nous n’importe qui, au nom de la non-discrimination, nous n’aurons plus qu’à nous en prendre à nous-mêmes. L’Etat, garant de la non-discrimination au yeux de la Loi, s’immisce dans nos choix personnels et privés, pour imposer une fausse tolérance, et une vraie atteinte à la propriété privée. Il en va de même de l’interdiction de fumer dans les cafés/restaurants : en définissant les cafés comme des lieux publics, l’Etat s’approprie un lieu qui n’est que privé (en aucun cas public) et porte atteinte aux droits individuels.
Reprenons l’exemple du café-restaurant : l’Etat intervient dans un lieu privé et décide arbitrairement d’une règle d’exclusion. Un fumeur ne doit plus être accepté dans un café. Et si l’Etat décide un jour que l’on doit exclure des cafés, par exemple, les juifs, ou les arabes ? Chacun devrait être libre de décider des règles d’exclusion chez lui. C’est le seul moyen d’éviter des règles d’exclusion imposées d’en haut, de manière arbitraire et potentiellement dangereuse.
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