Quelle égalité voulons-nous ? Une égalité devant la Loi, telle que l’entend la déclaration des droits de l’homme, ou une égalité de fait entre les humains ? La réponse est évidente, car une stricte égalité entre les humains n’est ni possible, ni souhaitable. Le respect de la liberté ET de l’égalité implique de bien définir ce qu’on entend par « Egalité ».
Je suis toujours surpris par le statut que prend l’égalité quand on entend un débat à la radio, ou à la télévision. Dans le discours de la plupart, ce qui est visé est une égalité de fait : réduire les inégalités semble être un but ultime pour définir une société juste. La dernière fois que j’ai entendu cette idée mise en avant, l’orateur faisait référence à la devise révolutionnaire « Liberté, Egalité, Fraternité« , devenue la devise de la France.
Cela est choquant, car Egalité, dans cette devise, signifie « égalité des citoyens devant la Loi ». C’est ce qui ressort de la lecture de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 :
- Article premier – Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune.
- Article 2 – Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression.
- Article 6 – La loi est l’expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement ou par leurs représentants à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. Tous les citoyens, étant égaux à ses yeux, sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents.
Rien à voir, donc avec une quelconque affirmation d’une nécessaire égalité dans les faits des différents individus, cette notion implique simplement que la Loi mise en place garde toujours un caractère général et applicable à tout individu. C’est un outil de justice : personne ne peut, en vertu de ce principe, être traité d’une manière particulière (liée à une quelconque de ses qualités) en bien ou en mal, par la Justice. Sans ce principe, on a vite fait de basculer dans une société arbitraire, et portant le germe du totalitarisme.
Faire dériver le sens du mot « Egalité » de cette devise vers un autre sens que l’égalité devant la loi est donc une atteinte à l’esprit de la Loi. L’égalité des être humains, dans les faits, n’est pas possible, ni même souhaitable. Ce qui est souhaitable, c’est que les plus démunis puissent vivre décemment, pas que tout le monde connaisse les mêmes conditions. Comment cela serait-il possible sans une formidable contrainte collective, normalisatrice, écrasant les individus ? Comment rendre les hommes égaux dans les faits, sans au passage complètement détruire la liberté individuelle ?
L’égalitarisme doctrinaire s’efforce vainement de contraindre la nature, biologique et sociale, et il ne parvient pas à l’égalité mais à la tyrannie.
Raymond Aron (1905 – 1983) philosophe, sociologue, politologue, historien et journaliste français.
Alors, oui à l’égalité devant la Loi, et non à l’égalité à tout prix ! L’égalité à tout prix, c’est le communisme et c’est le totalitarisme. Et c’est un prix bien trop lourd à mes yeux…
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