Retour sur l’Islam, l’islamisme et la distinction que l’on doit faire entre les deux. Pas si simple, parce que l’Islam est une religion politique. Pas si simple, parce que la moindre remise en cause de l’Islam en tant que religion est systématiquement taxée d’islamophobie. La plupart du temps par des gens qui sont par ailleurs assez anti-religions, anti-cléricaux. Donnons la parole, donc aux femmes qui connaissent l’Islam (puisque le statut de la femme dans l’Islam est une des composantes qui choquent le plus), et à des « modérés » (que l’on reconnait souvent comme étant ceux qui critiquent l’Islam).
Regarder les choses en face
La série d’interview des blogueurs politiques m’a permis de me rendre compte d’une chose : pour la plupart, l’Islam est perçu comme une religion habituelle, dont le contenu et les visées ne sont – ni plus ni moins – rien d’autre que ceux des autres religions. En gros, l’Islam serait tout à fait respectable, et c’est l’Islamisme qui poserait problème. C’est une attitude moralement défendable, et justifiée puisqu’elle consiste à vouloir séparer les « modérés » des « extrêmes ». Cela implique automatiquement, dans un second temps, de définir ce qu’on met sous ces appellations de modérés, et d’extrêmes. Où se situe la ligne de scission entre les deux ?
Par ailleurs, je crois qu’il faut faire très attention à ne pas mettre toutes les religions dans le même sac. L’histoire des différentes religions n’est pas identique, et les similitudes que l’on peut y voir conduisent tout de même à constater que l’Islam est en retard. Et que les critiques justifiées contre la religion catholique, par exemple, portent sur des choses datant déjà d’un siècle ou plus, et qu’elles ont des résonnances non pas dans l’Islam d’il y a un siècle, mais dans l’Islam d’aujourd’hui. Et que tous ceux que les excès de la religion – quelle qu’elle soit – inquiètent, doivent aujourd’hui être conscient que le fanatisme aujourd’hui est présent, et véhiculé par l’Islam. Critiquer une religion, ses excès, ses dangers, n’est pas critiquer les personnes qui la pratiquent tranquillement dans leur coin, le plus souvent par tradition.
La parole aux femmes
Deux articles, écrits par des femmes dont le combat est la dénonciation des méfaits de l’Islam, m’ont interpellés récemment : une interview d’Ayaan Hirsi Ali, dans Le Monde, et la tribune de Benazir Bhutto, juste après l’attentat qui a lieu à l’aéroport où l’attendaient des milliers de personnes.
Je me suis servi abondamment de l’excellent lien que nous avait glissé Anne, dans les commentaires du billet sur l’affaire Truchelut. On y trouve différentes sections regroupant les propos, articles, interviews, de différentes femmes – courageuses est un faible mot – qui combattent l’Islam. A lire absolument, à mon avis, pour ceux qui veulent se faire une idée par eux-mêmes. Plusieurs de ces femmes sont sous le coup de fatwas : on attend toujours les organisations musulmanes dites modérés pour qu’elles combattent ces fatwas et qu’elles les condamnent. Les fatwas sont des appels au meurtre dirigés contre ceux et celles qui osent critiquer l’Islam, ou le quitter. Du totalitarisme réel. La ligne de scission entre « modérés » et « extrêmistes » doit être aussi dessinée par les musulmans. Qui mieux que les musulmans peut critiquer leur religion ? Qui mieux qu’eux peut souligner les évolutions nécessaires pour que l’Islam deviennent une religion de paix, spirituelle et ne débordant pas sur la sphère politique ? Les musulmans laïcs doivent avoir voix au chapitre, sous peine de confiscation de l’Islam par les « purs » et durs.
Les fatwas ne sont pas très loin de nous, il suffit de repenser à Robert Redeker (menaçé de mort pour un article critiquant les aspects indéfendables de l’Islam), ou à Théo Van Gogh (tué par balle aux Pays-bas pour ses films critiques envers l’Islam).
Ayaan Hirsi Ali, toujours menacée de mort, et obligée de trouver refuge aux USA un temps, et que la Hollande ne veut plus héberger, avait déjà signé beaucoup d’articles critiquant l’Islam. Je me rappelle d’un où elle dénonçait la propagande néfaste dans les pays musulmans.
Taslima Nasreen, très critique aussi envers l’Islam, est également sous le coup de fatwas. Son interview vaut le détour, je trouve.
Appel à la raison
Suite à l’affaire des caricatures, douze intellectuels – dont plusieurs dissidents de l’islam menacés de mort et exilés en Europe et aux Etats-Unis à cause de leur positions laïques – ont décidé de signer un manifeste pour appeler ensemble à une résistance idéologique à l’intégrisme, ce nouveau totalitarisme qui menace le siècle. Il s’agit du « manifeste des Douze« , et je pense qu’il fait une bonne conclusion pour ce billet.
« Ensemble contre le nouveau totalitarisme »
Manifeste publié dans Charlie Hebdo le 1er mars 2006
Après avoir vaincu le fascisme, le nazisme, et le stalinisme, le monde fait face à une nouvelle menace globale de type totalitaire : l’islamisme.
Nous, écrivains, journalistes, intellectuels, appelons à la résistance au totalitarisme religieux et à la promotion de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité pour tous.
Les évènements récents, survenus suite à la publication de dessins sur Mahomet dans des journaux européens, ont mis en évidence la nécessité de la lutte pour ces valeurs universelles. Cette lutte ne se gagnera pas par les armes, mais sur le terrain des idées. Il ne s’agit pas d’un choc des civilisations ou d’un antagonisme Occident — Orient, mais d’une lutte globale qui oppose les démocrates aux théocrates.
Comme tous les totalitarismes, l’islamisme se nourrit de la peur et de la frustration. Les prédicateurs de haine misent sur ces sentiments pour former les bataillons grâce auxquels ils imposeront un monde liberticide et inégalitaire. Mais nous le disons haut et fort : rien, pas même le désespoir, ne justifie de choisir l’obscurantisme, le totalitarisme et la haine. L’islamisme est une idéologie réactionnaire qui tue l’égalité, la liberté et la laïcité partout où il passe. Son succès ne peut aboutir qu’à un monde d’injustices et de domination : celle des hommes sur les femmes et celles des intégristes sur les autres. Nous devons au contraire assurer l’accès aux droits universels aux populations opprimées ou discriminées.
Nous refusons le « relativisme culturel » consistant à accepter que les hommes et les femmes de culture musulmane soient privés du droit à l’égalité, à la liberté et à la laïcité au nom du respect des cultures et des traditions.
Nous refusons de renoncer à l’esprit critique par peur d’encourager l’ « islamophobie », concept malheureux qui confond critique de l’islam en tant que religion et stigmatisation des croyants.
Nous plaidons pour l’universalisation de la liberté d’expression, afin que l’esprit critique puisse s’exercer sur tous les continents, envers tous les abus et tous les dogmes.
Nous lançons un appel aux démocrates et aux esprits libres de tous les pays pour que notre siècle soit celui de la lumière et non de l’obscurantisme.
Ayaan Hirsi Ali
Chahla Chafiq
Caroline Fourest
Bernard-Henri Lévy
Irshad Manji
Mehdi Mozaffari
Maryam Namazie
Taslima Nasreen
Salman Rushdie
Antoine Sfeir
Philippe Val
Ibn Warraq
Rajout de dernière minute : Un excellent article sur l’Islam en France, l’UOIF et Sarkozy, sur le blog d’Alexandre Del Valle.
Laisser un commentaire